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SAINT-GEORGES DE MARSAIS CHARLES HECTOR DE (1688-1755)

Né à Paris, Charles Hector de Saint-Georges de Marsais (ou Marsay) se retire d'abord dans l'ermitage de Schwarzenau où il se livre à l'oraison et à la lecture des œuvres d'Antoinette Bourignon. Lieutenant à l'armée en Brabant, il résigne son engagement, puis se rend avec deux autres mystiques (le pasteur Baratin et le Suisse Cordier) dans la principauté de Wittgenstein. De fréquents séjours en Suisse romande lui permettent de se lier avec nombre de piétistes et de mystiques ; il habite quelque temps à Vevey chez le piétiste Magny, rentre en Allemagne en 1719, et se fixe à Berlebourg, centre de la « Société philadelphique » qui groupe divers représentants de l'irénisme.

C'est là qu'est publiée par Johann Heinrich Haug (mort en 1753) la Berleburger Bibel (1726-1742), qui, louée par Jung-Stilling et marquée par l'influence de Böhme, Johann Ardnt, Fénelon, Mme Guyon, Antoinette Bourignon, Browley, Pordage, Jane Lead, répand la théorie de l'homme primitif androgyne dans les milieux du piétisme continental, mais aussi en Scandinavie et aux Pays-Bas ; il s'agit d'une nouvelle traduction allemande commentée de la Bible, sorte de justification exégétique des croyances répandues par Hedwig Sophie et Kasimir von Sayn-Wittgenstein-Berlebourg. À Berlebourg, Marsais publie ses ouvrages, de 1738 jusqu'à sa mort. Il fait la connaissance de Zinzendorf, puis, en 1734, de Frédéric de Fleischbein, qu'il va diriger spirituellement. Ce dernier le remplace en 1755 comme directeur de toute une communauté de Vaudois ; en 1740, Fleischbein s'établit à Pyrmont, qui devint le centre des mystiques quiétistes allemands ; il traduit en allemand les œuvres de Mme Guyon et entretient une abondante correspondance avec les chrétiens « intérieurs » de nombreux pays. À sa mort, Dutoit-Membrini transportera à Lausanne le siège de la secte.

Vers la fin de sa vie, Marsais se rallie à la théorie de la justification du pécheur par le sang de Jésus-Christ, évolution qui sera sévèrement jugée par quelques autres représentants de la religion « intérieure », dont Dutoit-Membrini, que tant d'affinités rattachent néanmoins à Marsais. Bien qu'il écrive un Traité de la magie, Marsais ne préconise pas les voies actives de celle-ci, mais plutôt une passivité de type quiétiste. À côté d'Antoinette Bourignon, ce sont Böhme, Mme Guyon et Pierre Poiret qui nourrissent sa pensée et ses réflexions. Les ouvrages de Marsais auraient été écrits sous la dictée divine sans que lui-même tirât rien de son propre fonds.

Pour Marsais, la chute de Lucifer produisit le chaos, matière grossière dont ce monde fut formé. Créé pour remplacer les anges rebelles, l'homme androgyne concevait sans plaisir charnel, dans l'union divine. Mais l'homme ayant été par les sens entraîné dans la chute, la terre fut maudite à cause de lui. Marsais développe une pittoresque géographie céleste dans laquelle chaque théosophe occupe une place bien déterminée.

— Antoine FAIVRE

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section), professeur à l'université de Bordeaux-III

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