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JAMES CHARLES (1906-1978)

Issu d'une famille américaine, Charles James effectue des études orageuses en Angleterre et en France avant de rejoindre ses parents à Chicago. C'est là qu'il ouvre, en 1926, une maison de modiste sous le nom de Charles Boucheron. Les premières clientes sont des amies fanatiques. Deux ans plus tard, il transporte son affaire à New York et vend des modèles au grand magasin Best & Co. L'été de 1929, James est à Londres où il devient vite la coqueluche de la société élégante ou cultivée : Virginia Woolf, parmi d'autres, admire ses créations. Malgré le succès de ses chapeaux, il connaît sa première faillite. Voyageant intensivement entre Londres et Paris pendant toute la décennie, James crée des modèles de chapeaux et de vêtements destinés aux confectionneurs américains, particulièrement Best & Co. et Marshall Field's. Au nombre de ses premières grandes réussites, la robe « Taxi », une formule conçue dès 1929, qui atteint sa forme finale en 1933 : un fourreau équipé d'une fermeture à glissière qui dessine une longue spirale autour de la silhouette. C'est en 1937 que James présente à Paris, dans le cadre d'un grand hôtel, sa nouvelle collection, qui comporte une série de manteaux constitués de bandes de gros-grain tissé par Colcombet. Ces manteaux à la coupe hiératique, étrange, sont appréciés des connaisseurs et font l'objet des célèbres photographies de Cecil Beaton. James a également conçu une étonnante veste de soirée, en satin molletonné, aux épaules intentionnellement exagérées.

De retour à New York en 1939, James y exerce une double activité de grand couturier exclusif et de concepteur de modèles de prêt-à-porter. Tandis que le couturier Castillo lui succède chez Elizabeth Arden où il fut modéliste de 1943 à 1945, James ouvre son propre salon de couture dans Madison Avenue.

Après la guerre, il présente à nouveau ses collections en Europe, tout en gardant la priorité à son salon américain. Il remporte en 1950 le Coty Award, distinction décernée par les journalistes de mode américains pour « le grand mystère de son chromatisme et l'art de ses drapés ».

En 1953, James lance pour les tenues de ville la ligne « Empire », à la silhouette fuselée et longiligne. Cette formule sera généralement adoptée dans la mode occidentale à la fin des années 1950.

Renouvelant la coupe des manteaux et tailleurs, il apprécie la forme paletot, dont l'ampleur accentue la carrure des épaules. Ce sont pourtant les robes du soir qui assurent, à l'époque, la suprématie de James. Il s'y livre à son goût pour les grands enroulements, les contrastes de couleurs, les vertigineux bouillonnés de taffetas et les froissements de satin. Ce déploiement de lyrisme s'accommode d'une discipline rigoureuse dans la construction. Une robe du soir de James est presque toujours le produit d'une recherche structurelle exigeante. Ainsi, la célèbre robe « Trèfle à quatre feuilles » (1953) est composée d'un corsage bustier et d'une jupe évasée en satin blanc et satin noir, le tout nécessitant trente pièces dont, cachés à l'intérieur, un fourreau de taffetas, un premier jupon de support et, par-dessus, une sorte de crinoline sinueuse en Nylon baleiné, qui offre un soutien à la jupe quadrilobée, elle-même solidement maintenue en forme par une épaisse doublure en Nylon rigide. Ces spectaculaires modèles du soir n'autorisent souvent qu'une faible liberté de mouvement, ainsi la robe « Papillon » (1954), composée d'un fourreau très étroitement drapé, doté à l'arrière d'une énorme queue de mousseline, tulle et satin, qui balaie largement le sol.

Adulé par des clientes richissimes et excentriques dans les années 1950, puis négligé dans les années 1960, James connaît l'amertume d'un déclin rapide dans la décennie suivante,[...]

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Écrit par

  • : conservateur du musée de la Mode et du Costume, palais Galliera

Classification

Autres références

  • PHANTOM THREAD (P. T. Anderson)

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    • 1 126 mots
    • 1 média
    S’il s'inspire du souvenir laissé par Charles James, grand couturier londonien (1906-1978) qui se considérait comme un « architecte structurel du vêtement » voulant « élever la mode au rang d'art plastique », Phantom Thread délaisse rapidement les arcanes de sa carrière mouvementée,...