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MÉRIEUX CHARLES (1907-2001)

Pionnier de la virologie industrielle, Charles Mérieux a profondément marqué le monde de la biologie et de la santé publique du xxe siècle. Il rêvait, disait-il, de vacciner tous les enfants du monde, s'inscrivant dans la lignée de Louis Pasteur dont son père, Marcel Mérieux avait été l'élève.

En 1897, ce dernier avait créé à Lyon un modeste laboratoire, « l'Institut biologique Mérieux », qui effectuait des analyses et produisait de la tuberculine et des sérums. Il avait par la suite acheté vingt hectares de prairie, à Marcy-l'Étoile, près de Lyon, pour y élever des animaux pour la production de sérums et de vaccins.

Charles Mérieux n'a pas encore vingt ans quand son frère aîné Jean, qui se destinait à travailler aux côtés de son père, est emporté par une méningite tuberculeuse foudroyante contractée dans le laboratoire familial. C'est à Charles qu'il revient de reprendre le flambeau. Il termine ses études de médecine et rejoint le laboratoire paternel dont il hérite, en 1937, à la mort de son père.

La guerre arrive. Charles Mérieux produit du sérum antitétanique pour l'armée, et installe un laboratoire dans les abattoirs de Lyon, où il prépare du sérum de bovidés, riche en protéines, qui est distribué gratuitement aux enfants des écoles pour lutter contre la malnutrition. Cette activité sert de façade à un réseau clandestin de transfusion sanguine pour la résistance.

À la Libération, Charles Mérieux est envoyé en mission officielle aux États-Unis pour étudier l'organisation de la collecte du sang et la préparation des dérivés sanguins. Il en rapporte une innovation majeure : la lyophilisation industrielle, qui permet de conserver les produits biologiques ; et la conviction que l'avenir de l'industrie des vaccins réside dans l'industrialisation de leur production.

En 1947, soutenu par le maire de Lyon, Édouard Herriot, Charles Mérieux crée sur le site des abattoirs de Lyon dans le quartier de Gerland « l'Institut français de la fièvre aphteuse » (I.F.F.A.) pour produire du vaccin anti-aphteux. Il est le premier à développer une méthode révolutionnaire pour l'époque, mise au point aux Pays-Bas : le virus nécessaire à la préparation du vaccin est cultivé in vitro, dans des cuves (et non pas recueilli chez des animaux infectés). Cette technique ouvre la voie à la production industrielle de vaccins antiviraux. Lors des épizooties de fièvre aphteuse, l'I.F.F.A. sera en mesure de fournir des millions de doses de vaccin.

Charles Mérieux applique également cette technologie à la production de vaccins humains. Dès 1958, l'I.F.F.A. produit sur cultures cellulaires le vaccin poliomyélitique inactivé (vaccin injectable) de Lépine, puis le vaccin vivant atténué (vaccin oral) d'Albert Sabin, et en 1975 le vaccin inactivé mis au point par Jonas Salk. L'unité de production des vaccins humains s'est entre temps installée à Marcy-l'Étoile sur le terrain qu'avait acheté Marcel Mérieux. L'Institut Mérieux produit un nouveau vaccin contre la rage développé sur cellules humaines diploïdes en collaboration avec Hilary Koprowski à l'Institut Wistar, un vaccin contre la rubéole mis au point par Stanley Plotkin, et des vaccins associés permettant de vacciner simultanément contre plusieurs maladies. L'Institut développe la production de masse sur cellules en suspension sur microporteurs, dans des fermenteurs de grande capacité, tandis qu'est mise en place une unité de production d'albumine humaine à partir de placentas.

En 1967, Charles Mérieux laisse la présidence de l'Institut à son fils Alain, tandis que Rhône Poulenc prend la majorité du capital de la société. C'est Alain Mérieux qui réalisera un des rêves de Charles, un rapprochement avec l'Institut Pasteur, l'Institut Mérieux devenant[...]

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Écrit par

  • : directeur scientifique à la fondation Mérieux
  • : directeur général de la fondation Mérieux

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