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SCHULZ CHARLES MONROE (1922-2000)

Des adultes modèle réduit

Peanuts présente un monde strictement enfantin – aucun adulte n'y apparaît – et le graphisme minimaliste – quelques traits pertinents suffisent à identifier les protagonistes – accentue l'aspect puéril de la série. Cette naïveté n'est cependant qu'apparente, car les préoccupations qui s'y expriment sont bien celles d'adultes – d'où un décalage savoureux entre l'allure des personnages et leurs propos. Dans Apocalittici e integrati (1965), Umberto Eco remarquait que ces enfants sont les « réductions infantiles monstrueuses de toutes les névroses du citadin moderne ». Mais l'intérêt de la bande dessinée tient également au fait que Peanuts est un art de la variation : au fil du temps, Charles Schulz donne de très nombreuses versions d'un même gag, d'une même situation entre ses personnages, si bien que, comme l'a écrit le critique et théoricien Thierry Groensteen, le lecteur « savoure Peanuts comme un amateur de théâtre se rend à une nouvelle interprétation d'un classique du répertoire ». Charles Schulz en vient à pratiquer systématiquement l'autocitation, son humour se rapprochant ainsi de l'abstraction, une évolution qui va de pair avec un graphisme de plus en plus dépouillé.

La relation avant tout familière que des centaines de millions de lecteurs entretenaient avec Peanuts explique sans doute le succès de l'œuvre, qui allait bien au-delà des amateurs de bandes dessinées, ainsi que le sentiment de deuil éprouvé par beaucoup après la fin simultanée de la série et de son auteur. Contrairement à la quasi-totalité des séries publiées par la presse américaine, la bande dessinée ne fut pas prolongée après la mort de son créateur (Schulz avait d'ailleurs pris des dispositions pour que Peanuts s'arrête avec lui). Des journaux de différents pays en republient des épisodes, et une édition intégrale et chronologique en vingt-cinq volumes, The Complete Peanuts, a commencé à paraître aux États-Unis en 2004 (Fantagraphics Books, traduction en français chez Dargaud sous le titre Snoopy et les Peanuts).

— Dominique PETITFAUX

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  • BANDE DESSINÉE

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    • 22 913 mots
    • 16 médias
    ...1948, Pogo par Walt Kelly (1913-1973), satire sociale et politique sous le couvert d’une bande animalière dont le personnage central est un opossum, et en 1950 Peanuts (en français, Snoopy et les Peanuts) par Charles M. Schulz (1922-2000), qui transpose les problèmes psychologiques des adultes dans le...