MÜNCH CHARLES (1891-1968)
Charles Münch fait partie de ces rares chefs d'orchestre français reconnus dans le monde entier comme l'une des figures marquantes de la musique de son pays. Doté d'un charisme légendaire, sa culture musicale allait cependant au-delà d'une parfaite maîtrise du répertoire français. Ses ascendances alsaciennes ainsi que la formation qu'il avait reçue en Allemagne lui avaient conféré une ouverture artistique encore rare dans l'univers de la direction d'orchestre française à sa génération. Son nom n'a jamais été oublié, ses enregistrements sont toujours restés disponibles et sa discographie s'est même enrichie de nombreux trésors inédits. L'un des secrets de cette réussite hors norme, c'était le côté imprévisible de Münch : jamais deux de ses interprétations n'étaient identiques. Son autorité naturelle s'imposait sans discours ni cris : « Il nous aurait fait traverser une rue à quatre pattes sans que nous ayons besoin d'aller sur l'autre trottoir », avouaient certains instrumentistes, qu'il appelait « mes enfants ».
Une double formation
Charles Münch naît le 26 septembre 1891 à Strasbourg (alors capitale du Reichsland d'Alsace-Lorraine) dans une famille de musiciens : son père, Ernst Münch (1859-1928), fondateur et directeur du chœur Saint-Guillaume, occupe une place importante dans la vie musicale de la métropole alsacienne ; son frère aîné, Fritz Münch (1890-1970), reprendra le flambeau paternel. Charles Münch est aussi le neveu d'Albert Schweitzer, dont il sera toujours très proche.
Il est initié à différents instruments – piano, orgue et violon –, mais c'est ce dernier instrument qui va devenir son compagnon de prédilection pendant de nombreuses années. Strasbourg est alors un point stratégique que visent les artistes français et allemands. Le jeune Charles Münch voit ainsi diriger Arthur Nikisch,Vincent d'Indy, Édouard Colonne et Gabriel Pierné. Il est donc dès son enfance formé à deux écoles artistiques. Il suit même des cours de composition. Après son baccalauréat, il part pour Paris travailler avec Lucien Capet. Simultanément, il s'inscrit à la faculté de médecine mais, de son propre aveu, devient vite simplement « un nom inscrit sur les registres de l'Université ». Il complète sa formation instrumentale avec Carl Flesch, à Berlin.
Enrôlé dans l'armée allemande comme sujet alsacien, Münch ne débute véritablement sa carrière qu'après la Grande Guerre. En 1919, il est nommé second violon solo à l'Orchestre municipal de Strasbourg – alors dirigé par Guy Ropartz – et professeur au Conservatoire de cette même ville. En 1925, il devient Konzertmeister (premier violon solo) à l'Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, où il joue sous la baguette de Wilhelm Furtwängler, Fritz Busch et Bruno Walter. Un dimanche, le Kantor Karl Straube, malade, ne peut diriger une cantate de Jean-Sébastien Bach à la Thomaskirche. L'organiste se récuse et l'on fait appel à Münch. Peu après, la reconstitution d'un concert dans le style ancien lui permet de diriger de sa place de violon solo. Sa décision de devenir chef d'orchestre est prise. Il ne reste plus qu'à attendre l'heure propice.
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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Média
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OZAWA SEIJI (1935-2024)
- Écrit par Encyclopædia Universalis et Alain PÂRIS
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...d'orchestre de Besançon, où il remporte le premier prix en 1959. À Paris, il travaille avec Eugène Bigot – qui présidait le jury à Besançon – et, grâce à Charles Münch, autre membre du jury, il peut aller étudier au Berkshire Music Center de Tanglewood, où il obtient un an plus tard la bourse Koussevitzky....