BYRD CHARLIE (1925-1999)
Le guitariste et compositeur américain Charles L. Byrd naît le 16 septembre 1925 à Chuckatuck, près de Suffolk (Virginie), dans une famille très musicienne. Dès l'âge de dix ans, il aborde l'étude de la guitare avec son père. C'est paradoxalement en Europe, où il sert à la fin de la Seconde Guerre mondiale, qu'il découvre le jazz ; sa rencontre à Paris avec Django Reinhardt, avec qui il joue, va être déterminante. Après sa démobilisation, il se fixe à New York et se produit avec des musiciens de jazz : avec les clarinettistes Joe Marsala et Sol Yaged (1947), puis avec les pianistes Barbara Carrol (1948) et Freddie Slack (1949).
Mais l'attraction de la musique classique est la plus forte. Byrd abandonne tout pour étudier l'harmonie avec le musicologue Thomas Simmons et la technique de la guitare classique avec Sophocles Papas (1950). Il se rendra même à Sienne, en Italie, afin de prendre en 1954 des leçons auprès d'Andrés Segovia. Il fonde à Washington, avec Keter Betts à la contrebasse et Berstell Knox à la batterie, un trio (1957-1959) dont le répertoire, assez composite, s'étend de la musique du xvie siècle au jazz. En 1959, il rejoint le sextette de Woody Herman, avec lequel il se produit en Grande-Bretagne et en Arabie Saoudite. Avec son propre trio, il participe en 1961 à une tournée en Amérique latine organisée par le département d'État. Il y rencontre une musique populaire dont les couleurs et la vitalité l'enchantent. Charlie Byrd est l'un des principaux artisans de l'irrésistible vague de bossa-nova qui va submerger les États-Unis. En 1962, il enregistre chez Verve, avec Stan Getz et Antonio Carlos Jobim, un album, Jazz Samba, dont le succès sera planétaire (il contient les standards Desafinado et Samba De Uma Nota So, composés par Jobim). Suit, la même année, Bossa Nova Pelos Passaros. Malgré l'existence de plusieurs précurseurs – Laurindo Almeida et Bud Shank, notamment –, Byrd et Getz se disputeront la paternité de ce nouveau style – et les opulents droits d'auteur qui s'y rattachent... – jusque devant les tribunaux.
Aux frontières du jazz et de la musique de variétés, l'œuvre de Charlie Byrd semble, pour un temps, promise à une popularité universelle. Il effectue plusieurs tournées européennes avec Les McCann et Zoot Sims. Il est même invité en 1965 pour un concert à la Maison-Blanche. Avec Barney Kessel et Herb Ellis, il forme, en 1973, le groupe Great Guitars. Comme leader ou soliste invité, il a enregistré – pour Riverside, Verve, Columbia, Fantasy ou Concord – une centaine d'albums, dont un disque de tangos avec Laurindo Almeida (Tango, 1985). Absent depuis de longues années de la scène, il est néanmoins resté constamment présent grâce à une discographie sans cesse rééditée. Il meurt à Annapolis (Maryland) le 2 décembre 1999.
N'en déplaise aux tenants de la « world music », le mélange des genres a rarement réussi au jazz. Charlie Byrd est à cet égard un parfait exemple des dangers que fait courir l'éclectisme. Il fréquente en effet de nombreux univers – jazz, bossa-nova, classique – sans vraiment exceller dans aucun, ni imposer une signature caractéristique. Honnête technicien, il propose un intéressant jeu en accords, un toucher délicat et un très agréable sens des couleurs. En revanche, une virtuosité bien limitée, une invention très courte et un net penchant pour le maniérisme définissent une personnalité assez pâle et une esthétique plus proche de la musique d'ambiance que de l'esprit véritable du jazz. Ce qui, à l'évidence, n'empêche pas de conquérir le monde...
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Écrit par
- Pierre BRETON : musicographe
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