CHARTREUX
La vie cartusienne se présente comme un commentaire vivant d'un texte du prophète Osée (ii, 16) : « Je te conduirai au désert et parlerai à ton cœur. » Le désert n'est pas seulement un lieu où l'homme et Dieu parlent « bouche à bouche » (Nombres, xii, 7-8) ; dans la solitude, le silencieux saisit ses propres conflits et affronte ses démons intérieurs.
Les Chartreux sont les successeurs des solitaires d'Égypte, des Thérapeutes décrits par Philon et des Pères du désert. À toutes les époques, des hommes se sont retirés dans des lieux inhabités pour se consacrer, d'une façon rigoureuse et absolue, à Dieu.
Le chartreux appartient déjà au monde futur. Ressuscité avec le Christ, dès son existence temporelle, il acquiert, par le creuset du désert, une vie nouvelle et assume ainsi un rôle de médiateur entre le monde et Dieu.
Origines
Au mois de juin 1084, l'évêque de Grenoble, saint Hugues, conduisit dans une petite vallée du massif de la Grande-Chartreuse sept compagnons qui lui avaient demandé un endroit propice à la vie solitaire. Leur chef était Bruno, qui avait alors dépassé la cinquantaine. Né à Cologne, il avait demeuré à Reims une trentaine d'années, successivement étudiant, chanoine, écolâtre, enfin chancelier. Après avoir refusé d'être le complice de l'indigne archevêque Manassès, il abandonna son enseignement et se retira pendant un an au lieu appelé Sèche-Fontaine, appartenant à l'abbaye de Molesmes (Côte-d'Or), à partir de laquelle l'abbé Robert devait fonder, une quinzaine d'années plus tard, le monastère de Cîteaux.
Bruno, qui espérait avoir trouvé dans le massif de la Grande-Chartreuse une retraite définitive, fut contraint de le quitter en 1090, à l'appel de son ancien élève, Eudes de Châtillon, devenu le pape Urbain II, soucieux de s'entourer de conseillers sûrs. Mais il ne resta pas longtemps à Rome : après avoir refusé l'archevêché de Reggio, il se retira en Calabre, où il mourut le 6 octobre 1101.
Un moment abandonné, en 1090, l'ermitage de la Grande-Chartreuse fut réoccupé par des disciples de Bruno. Guigues, né en 1083, entré en 1106 à la Grande-Chartreuse, dont il devint le cinquième prieur en 1109, rédigea vers 1125 les premières Coutumes, qui sont un code de vie monastique aussi intéressant par les multiples détails qu'il contient que par l'esprit de sagesse qui l'anime. Guigues mourut le 27 juillet 1136.
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Écrit par
- Jacques DUBOIS : moine bénédictin, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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