CHASSE
La chasse est passée en quelques milliers d'années d'une pratique de survie à celle d'un loisir, en passant par la splendeur d'une représentation de l'autorité seigneuriale et royale. Un encadrement juridique de rigueur croissante et une intolérance à la mort animale conduisent cette pratique ancestrale à une remise en cause inédite.
Actuellement, alors qu'il n'existe en France aucune définition juridique de la pêche privée, la loi formule sa propre définition de la chasse : « Constitue un acte de chasse tout acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier ayant pour but ou pour résultat la capture ou la mort de celui-ci » (Code de l'environnement, article L420-3). Le périmètre de la notion de « chasse » intéresse évidemment le juge qui statue sur la responsabilité civile ou pénale du chasseur. La chasse se définit ainsi par son objet – le gibier –, qui ne représente qu'une certaine catégorie parmi les animaux sauvages, par son contenu – la recherche, la poursuite ou l'attente –, et par son but – la capture ou la mort. Cependant, le contenu réel en est beaucoup plus divers.
Richesse sémantique de la chasse
L'origine des mots qui servent ou ont servi à décrire les différents aspects de la chasse, ainsi que l'évolution de leur sens constituent une bonne introduction aux différentes fonctions de la chasse. Le mot du français moderne « chasse » est issu du verbe chacier (1130) du bas latin captiare, signifiant rechercher le gibier pour le tuer ou le « capturer ». Un autre mot latin, venari, est d'une signification voisine. Il a donné naissance au terme « vénerie », qui aujourd'hui désigne la chasse à courre, ou en tout cas la chasse sans arme à feu (on parle parfois de vénerie à propos de la chasse sous terre, ou déterrage). Le substantif chace, lorsqu'il apparaît en français vers 1165 désigne surtout la poursuite aux chiens courants et apparaît concurrent des dérivés de venari. Les verbes latins venor, devenu en vieux français veneor, et captiare, devenu chacier, sont longtemps restés synonymes. Le mot venor semble même avoir été d'une acception encore plus générale que captiare. Pline, dans ses Histoires naturelles, l'emploie même pour désigner la pêche. Le mot du vieux français venateur désignait à l'origine le chasseur au sens le plus large, et pas spécialement le chasseur à courre. Au fil du temps, le mot chasseur a progressivement pris le dessus. Si le mot vénerie a subsisté, c'est sans doute du fait du développement de l'usage des armes à feu pour la chasse, et donc de nouvelles pratiques qu'il a fallu distinguer de l'ancienne poursuite du gibier avec chiens, chevaux, dagues ou épieux. De la même manière, le mot chasse s'est affirmé comme un terme générique : on parle à présent de chasse à tir, au vol, en battue, à courre, à l'affût... Parallèlement, le mot vénerie s'est de plus en plus spécialisé, pour finir par ne désigner que la chasse « à courre, à cor et à cri », ou éventuellement la chasse sous terre. En 1750 est apparu le mot « cynégétique », du grec kunêgetikios, qui signifie « chasser avec une meute ». Ce terme, adjectif et substantif, désigne aujourd'hui l'ensemble des connaissances de la chasse. On parle, par exemple, de l'art cynégétique ou de la réglementation cynégétique. Le mot chasse désigne désormais globalement tous les actes cynégétiques ; il peut enfin, par extension, désigner un territoire (louer une chasse), un équipage (c'est ici que la chasse peut passer), voire une saison (se retirer à la campagne pendant la chasse). Cette évolution des mots et de leurs sens sur un millénaire traduit les modifications de la pratique et de l'encadrement de la chasse.
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Écrit par
- Xavier PATIER : écrivain, administrateur de la Fondation pour la Maison de la chasse et de la nature
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