VINCENNES CHÂTEAU DE
Depuis le xiie siècle, les rois de France possédaient dans la forêt de Vincennes un pavillon de chasse que Philippe Auguste agrandit considérablement. C'est Saint Louis qui allait donner au pavillon une véritable importance en y édifiant une chapelle dédiée à saint Martin. Elle devint une résidence royale sous ses successeurs et fut dotée d'une enceinte munie de tours que l'on connaît par des plans. Charles V, dès son avènement au trône (1364), allait complètement transformer l'ancien manoir en édifiant le donjon de 1364 à 1369, l'enceinte, qui sera terminée à sa mort en 1380, et en commençant la construction d'une vaste sainte-chapelle qui sera voûtée au xvie siècle par Philibert Delorme. Le donjon, puissante construction militaire aménagée très confortablement à l'intérieur, revient aux principes de l'époque romane, en perçant la porte d'accès à l'étage, mais annonce des formules nouvelles avec le chemin de ronde qui court sans interruption et son plan centré qui permet, grâce aux tours en forte saillie, de « battre les murs ». L'enceinte rectangulaire (334 m de longueur sur 175 m), qui englobe 6 hectares, ne fait que confirmer ces innovations sur le plan militaire : elle est entourée d'un fossé profond et large. Les courtines, relativement basses, sont condamnées par neuf tours qui, à l'origine, les dominaient de quelque 27 mètres. Ces tours — dont seule celle du Village a conservé sa hauteur originelle — sont de puissants massifs rectangulaires qui forment des ouvrages autonomes de défense. Au sommet, une plate-forme protégée par des mâchicoulis était destinée à recevoir des pièces d'artillerie. Charles V voulait, à l'intérieur de cette fortification, installer les manoirs des plus puissants seigneurs de l'époque. Il annonce par ce projet celui que réalisera Louis XIV à Versailles. En effet, comme plus tard Louis XIV, Charles V avait subi les assauts de son peuple et se méfiait des révoltes de la capitale. Le point final de cette entreprise fut la sainte-chapelle. Commencée un peu après 1370, elle s'élevait déjà au niveau de l'appui des fenêtres à la mort de Charles V. Charles VI fit mener l'œuvre jusqu'au sommet des murs, François Ier et Henri II l'achevèrent en la couvrant, en coiffant les contreforts de pinacles et en la voûtant. Le scrupuleux respect du projet initial permet d'y voir une œuvre de l'époque de Charles V ; elle annonce déjà, par le mouvement des courbes et des contre-courbes du réseau des baies, l'art flamboyant. Ces trois monuments conservent enfin un nombre impressionnant de sculptures qui permettent de mieux apprécier le rôle des sculpteurs de Charles V dans l'élaboration de la plastique de la fin du xive siècle. Sluter y puisera une part de son inspiration.
Entre 1654 et 1661, Louis XIV fit moderniser la forteresse par son architecte Louis Le Vau. Celui-ci éleva du côté du bois, à l'intérieur de l'enceinte de Charles V, deux pavillons symétriques, celui du Roi à l'ouest, celui de la Reine à l'est. Ils étaient reliés l'un à l'autre par deux portiques (celui du nord a été reconstitué il y a quelques années). L'un et l'autre, très sobres, sont constitués d'un long corps de logis très régulier, épaulé à ses extrémités par de puissants pavillons à peine saillants. Cette sévérité architecturale s'accordait bien au rôle de défense avancée de Paris vers l'est que lui destinait le roi. Une grande fantaisie régnait en revanche à l'intérieur dans l'ornementation des appartements. Philippe de Champaigne prit la direction des travaux. Le Louvre conserve de ce splendide décor presque entièrement disparu le très beau plafond du pavillon de la Reine, peint par Michel Dorigny, et des lambris.[...]
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Écrit par
- Alain ERLANDE-BRANDENBURG : conservateur général honoraire du Patrimoine
Classification
Autres références
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CHÂTEAU FORT
- Écrit par Michel BUR
- 3 299 mots
- 9 médias
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