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CHÂTEAU FORT

Châteaux et maisons fortes du bas Moyen Âge

Caractères généraux

Les événements militaires et les guerres civiles du bas Moyen Âge se sont traduits par des modifications significatives dans la silhouette des châteaux. Les progrès de l'échelade, c'est-à-dire de l'attaque au moyen d'échelles employées massivement et simultanément, ainsi que le tir parabolique de la primitive artillerie à feu, ont eu pour conséquence la surélévation des courtines qui ont bientôt atteint la même hauteur que les tours. Désormais une terrasse, comme à Tarascon, ou un chemin de ronde continu, comme à Pierrefonds, se développe au sommet de l' enceinte, facilitant les déplacements de la garnison. Celle-ci peut s'étoffer à proportion des logements qui sont construits contre les courtines surélevées.

Pierrefonds - crédits : Encyclopædia Universalis France

Pierrefonds

Château de Pierrefonds - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Château de Pierrefonds

Dans le château transformé en caserne, le donjon retrouve son utilité. Il redevient le refuge du seigneur qui s'y met à l'abri des surprises tant de ses ennemis que des troupes qu'il a soldées. À Vincennes, le roi fait construire une tour résidentielle de 16 mètres de côté, cantonnée de tourelles cylindriques, haute de 52 mètres avec porte au premier étage, voûtes intermédiaires, cheminées, puits et latrines. Le plan pourrait être qualifié d'archaïque si la forme quadrangulaire n'était considérée à juste titre comme la mieux adaptée à l'habitation. L'empereur Charles IV devait agir de même à Karlstein en Bohême et Louis d'Orléans un peu plus tard à Pierrefonds.

Carmasac - crédits : Encyclopædia Universalis France

Carmasac

Le resserrement et l'exhaussement des édifices fortifiés eurent un retentissement sur la construction des maisons fortes. Beaucoup de petits seigneurs adoptèrent la formule de la Wohnturm (tour d'habitation) compacte cantonnée de deux tours en diagonale ou de quatre tours aux angles. Les casteras de l'Aquitaine anglaise sont de ce type. Derrière la muraille en pierre baignant dans l'eau du fossé, ils comportent souvent une structure en bois à plusieurs étages, le rez-de-chaussée étant réservé à l'entrée et aux celliers, le premier, éclairé par quelques fenêtres, à la grande salle et aux chambres, comme à Carmasac. Autant qu'un phénomène français, la Wohnturm est un phénomène européen qui touche aussi bien la Suisse que les Pays-Bas.

Les progrès de l'artillerie et leurs conséquences

À la fin du xve siècle, l'efficacité croissante de l'artillerie de siège a conduit à des résultats inverses de ceux que l'on observait au siècle précédent. Les constructions ont tendance à se rétrécir en hauteur et à s'enterrer derrière des boulevards de terre rapportée, de manière à échapper au tir désormais plus tendu des canons. Bien dessinés, ces boulevards peuvent aussi servir de plates-formes pour la riposte. Si un château comme Bonaguil offre un bon exemple d'adaptation aux nouvelles conditions de la guerre, Salses en Roussillon ou encore les fortins édifiés sur la côte anglaise dans la première moitié du xvie siècle, à Deal et à Walmer, constituent les premiers jalons d'une architecture militaire vraiment moderne.

L'époque qui s'ouvre avec la Renaissance se caractérise par la dissociation définitive de la fonction résidentielle et de la fonction militaire, et en conséquence par la disparition du château fort. Certes, des épisodes comme les guerres de Religion rendront un certain lustre aux vieilles forteresses, jusqu'au jour où les États monarchiques appuyés sur une puissante artillerie – Richelieu en France – en exigeront la démolition.

Perdant toute valeur militaire, la résidence seigneuriale s'ouvre sur l'extérieur. On abat des pans de murailles ; on recherche l'air et la lumière. Toutefois, les schémas traditionnels, tout imprégnés de souvenirs et de symboles, s'imposeront encore pendant de longues années. Percé du haut en bas de grandes[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire du Moyen Âge à l'université de Nancy-II, directeur de l'équipe de recherche associée au C.N.R.S.

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Médias

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Château de Falaise, Calvados

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