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CHINE : L'ÉNIGME DE L'HOMME DE BRONZE (exposition)

L'expositionChine : l'énigme de l'homme de bronze. Archéologie du Sichuan (XIIe-IIIe s. av. J.-C.), un des sommets de l'année de la Chine en France, eut lieu du 14 octobre 2003 au 28 janvier 2004 à la salle Saint-Jean de l'Hôtel de Ville de Paris. Elle avait pour commissaires Gilles Béguin, directeur du musée Cernuschi et Alain Thote, directeur d'études à l'École des hautes études (IVe section).

Le Sichuan est une grande province du Sud-Ouest de la Chine, excentrée, protégée, mais pas complètement isolée. Les sites Shang et Zhou du centre du pays ont longtemps dominé notre vision de l'âge du bronze en Chine. Avec les trouvailles du Sanxingdui (1986) et de Jinsha (2001), près de Chengdu, c'est une civilisation rivale qui apparaît. Son éclosion, ce qui fait sa singularité, sa disparition inexpliquée et ce qui lui succède après une longue interruption, faisaient donc ici l'objet d'une exposition de soixante-cinq pièces rigoureusement sélectionnées.

On savait que Sanxingdui était une ville aux murs de terre damée, comparable en dimensions à celles de la Chine centrale. Mais la découverte, en 1986, de deux fosses remplies d'os animaux, de défenses d'éléphants, de jades, de bronzes brisés et brûlés a surpris. Pourquoi tout cela a-t-il été détruit avant d'être enterré : catastrophe subie ou envoi rituel d'objets précieux dans l'au-delà ?

Les objets sont déroutants : masques monumentaux aux larges oreilles et aux pupilles protubérantes, têtes humaines aux traits stylisés, une statue de deux mètres cinquante (la seule de l'antiquité pré-impériale), de grands arbres représentés ici par les oiseaux, les clochettes qui s'y trouvaient accrochées… Tout cela, qui est en bronze, est inconnu en Chine centrale ; mais la technique première, elle, en provient. Le bronze est fondu dans des moules segmentés qu'on agence autour d'un noyau pour faire les vases divers destinés au culte des ancêtres. Trois séries de vases à boisson étaient présentées au long de l'exposition ; aucun n'a été fabriqué au Sichuan. Importés d'abord du moyen fleuve Bleu, puis du Nord ou du Centre, ils contenaient de petits objets de valeur ou, plus tard, des armes. Sanxingdui transforme la technique : surfaces plus lisses, parfois animées de peinture, coulées multiples et soudure pour des assemblages compliqués (un mystérieux objet cultuel superpose à un dragon ailé des figures sur plusieurs étages). L'extrême originalité technique indique un emprunt précoce, puis une évolution indépendante adaptée aux besoins locaux.

On peut en dire autant de l'industrie lithique. Lames et « armes » cérémonielles modifient des prototypes du Nord et du Centre. Fragiles, elles n'ont pu servir à tuer. Pourvues d'éléments de fixation, elles n'ont pourtant pas été emmanchées. Elles étaient offertes rituellement à deux mains, comme le montre une figurine agenouillée.

Autre surprise : l'or, inconnu à si haute époque dans le reste de la Chine, ici martelé en feuilles minces, pour un masque, une canne au décor figuré, dont la technique (un repoussé par pression latérale en surface) est elle aussi sans exemple.

À l'abandon de Sanxingdui, peu après – 1200, est lié l'essor de Jinsha, à 40 kilomètres de là, qui déclinera à son tour vers – 1000. Quelques objets découverts sur ce site en 2001 complétaient l'image de cette culture très singulière, mais qui s'est développée dans un large contexte d'échanges. La figure humaine (ancêtres, prêtres, souverains ?) ou hybride, le végétal, l'œil mis en relief dans les visages, omniprésent dans les décors, en sont les caractéristiques les plus étonnantes. Comment cette culture a-t-elle disparu ? Qu'y a-t-il ensuite ? Du tournant du [...]

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Écrit par

  • : maître de conférences émérite en histoire de l'Antiquité

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