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CHINOISE (CIVILISATION) La littérature

Le Moyen Âge

L'époque des Six Dynasties (IIIe-VIe s. apr. J.-C.)

L'effondrement de l'Empire des Han fut suivi d'une période troublée qu'on a pu comparer à notre Moyen Âge. Elle s'en rapproche par quelques traits caractéristiques : invasions des Barbares, qui occupent toute la partie septentrionale de la Chine ; irruption aussi d'une religion universaliste et égalitariste, le bouddhisme, qui contribue au bouleversement des structures politiques et sociales de l'ancienne Chine ; apparition, sous l'influence de cette religion, de nouvelles formes de pensée et d'art. Le nom de « Six Dynasties » ne tient compte que de celles des nombreuses dynasties de cette période qui s'établirent dans le bassin du Yangzijiang, avec Nankin pour capitale, et prétendirent perpétuer, dans cette région semi-coloniale encore, une sorte de légitimisme d'exil, tandis qu'au Nord, dans le bassin du fleuve Jaune, se succédaient de multiples dynasties d'origine barbare qui se disputaient la région alors la plus riche et la plus civilisée de la Chine. Le conflit de ces deux centres politiques et culturels est sensible dans l'histoire littéraire de cette époque.

La renaissance philosophique du iiie siècle

Au iiie siècle de notre ère, on vit refleurir soudain les écoles philosophiques de l'Antiquité, en particulier le taoïsme, dont les textes furent tirés de l'obscurité où ils s'étaient cachés pendant les quatre siècles de l'époque des Han. Dans les commentaires qu'on écrivit sur les textes philosophiques ainsi ressuscités, l'accent fut mis sur une métaphysique mêlée de mysticisme, qui devait jouer un rôle considérable dans l'évolution de la pensée chinoise. Les principaux représentants de ce mouvement philosophique firent partie du groupe dit des « Sept Sages de la forêt de bambous », groupe qui s'illustra littérairement avec Xi Kang (223-269) et Ruan Ji (210-263), tous deux taoïstes, d'un taoïsme philosophique, grave et fervent ; de leurs poèmes, de leurs essais en prose, écrits dans un style délicat et sans affectation, se dégage un parfum de foi personnelle qui annonçait en Chine un âge nouveau. Le vin y joue un grand rôle : mais c'était le vin mystique, l'adjuvant des ivresses spirituelles, tel qu'on le connaît en Occident par les poètes persans (qui ont peut-être emprunté ce thème à la Chine). Un peu plus tard, Tao Qian, ou Tao Yuanming (365-427), le plus grand nom de la poésie des Six Dynasties, devait porter à sa perfection ce genre de poésie d'inspiration religieuse, d'une simplicité raffinée dans la forme.

Le bouddhisme et le taoïsme

S'il y a des traces d'influence bouddhique chez Tao Qian, on n'en relève pas encore chez les grands écrivains du iiie siècle. Les Sept Sages de la forêt de bambous semblent tout ignorer de cette religion qui avait été importée de l'Inde au 1er siècle de notre ère, mais était restée cantonnée dans des cercles étroits de Chinois convertis. Ce n'est qu'au cours du ive siècle qu'après une longue incubation les idées bouddhiques se répandirent dans tout l'ensemble de la classe cultivée. La tradition chinoise devait dès lors s'en trouver radicalement modifiée : on peut dire que le Moyen Âge chinois, du ive au xe siècle environ, fut essentiellement bouddhique.

Du point de vue littéraire, tout en renouvelant les thèmes et les sujets, le bouddhisme exerça une action capitale sur les formes elles-mêmes, en rapprochant la langue littéraire de la langue vulgaire, puis en provoquant peu à peu la création d'une littérature en véritable langue vulgaire. Il s'était constitué, pour traduire en chinois les écritures sanscrites du bouddhisme, une langue particulière qui s'écartait de la langue classique tant en matière de vocabulaire et de syntaxe que par[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur honoraire au Collège de France
  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
  • : professeur à l'université de Paris-VII, directeur de l'Institut des hautes études chinoises au Collège de France
  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VIII, Saint-Denis
  • : professeur émérite des Universités, université Bordeaux Montaigne
  • : professeure émérite à l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO)

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