CHINOISE (CIVILISATION) Symbolisme traditionnel et religions populaires
Aspects traditionnels des grandes religions
La religion paysanne de l'Antiquité
Les plus anciens classiques chinois, à commencer par le Shi jing ou Livres des vers, fournissent déjà, quoique remaniés, de bons témoignages d'ordre religieux. Ils nous permettent de constater que, dès l'époque – viiie siècle avant J.-C. au plus tard – dont ils sont le reflet indirect, la religion chinoise se présente sous deux aspects assez différenciés : la religion du roi et de la noblesse, d'une part, et, de l'autre, la religion agraire ou religion paysanne. C'était, il est vrai, surtout par leur structure sociale et leur genre de vie que différaient les communautés paysannes et le monde royal et seigneurial. Les concepts religieux fondamentaux étaient les mêmes, autant qu'on sache. L'essentiel peut à l'extrême limite se résumer de la façon suivante : il y a une corrélation, un accord intime entre la nature et la société, qui obéissent tous deux à de semblables règles d'équilibre et d'alternance. La régularité de l'une dépend de la bonne conduite de l'autre. Car, par un inévitable anthropocentrisme, la société a néanmoins une sorte de prééminence sur la nature et, par des gestes et comportements appropriés dans les temps et lieux convenables, elle peut et doit l'aider ou l'inciter à suivre son cours normal, indispensable notamment à la bonne marche des travaux agricoles. C'est dans la mise en œuvre de ce principe général que se manifestèrent entre les religions seigneuriales et royales et la religion paysanne des différences, aggravées avec le temps par l'écart entre la société féodale et la société communautaire des villages. Mais il faut dire qu'on ne connaît la religion paysanne que par des documents peu nombreux, difficilement interprétés, qui n'en restituent qu'une image moyenne. Elle fut évidemment beaucoup plus diverse et complexe qu'on ne le pourra jamais savoir. Ses traits les plus caractéristiques sont les suivants.
À défaut de chef (sinon de conseil des anciens), la communauté villageoise possède un centre. C'est le dieu du sol, she, matérialisé par un tertre, un arbre, une pierre dressée. Du reste, chaque groupe social, du plus grand au plus petit, possède le sien. C'est à ce dieu qu'on annonce tous les événements survenant dans la communauté, les phases des travaux agricoles, l'ouverture et la fermeture des périodes de fête. On lui offre les prémices et on le nourrit de sacrifices. Mais ce dieu, en principe, n'a d'existence que par et pour son groupe socio-territorial. Il en est en quelque sorte la personnification en même temps que le protecteur, le surveillant et le porte-parole dans le monde des divinités.
Si ce n'est chaque village, au moins chaque groupe de villages liés entre eux par des relations d'intermariage possède en outre sur son territoire un « lieu saint ». S'y tiennent notamment les fêtes des saisons intermédiaires, printemps et automne, début des semailles et fin des moissons. Ce sont les moments cruciaux de la vie sociale et religieuse paysanne. S'y déroulent, en automne, des orgies, des échanges de toutes sortes – car ce sont aussi des marchés –, et, surtout, au printemps, des joutes d'amour sous forme d'échanges d'épigrammes, de chansons, de plaisanteries, de jeux et compétitions diverses entre jeunes gens et jeunes filles à marier de villages différents, fait d'autant plus remarquable que la séparation des sexes est de règle en temps ordinaire. Elles se terminent par des unions dans la campagne, avant mariage. Mais ces fêtes saisonnières furent considérées d'assez bonne heure comme licencieuses et excessives par les moralistes et politiciens officiels, qui les condamnèrent et les firent interdire, non sans peine, semble-t-il. Or il est clair, cependant, qu'elles avaient une valeur religieuse profonde[...]
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Écrit par
- Maxime KALTENMARK : ancien directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)
- Michel SOYMIÉ : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
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