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CHORÉGRAPHIE Vue d'ensemble

De nos jours, le mot chorégraphie désigne communément une création scénique qui a la danse pour principal langage. Plus concrètement, il s'agit de l'ensemble des gestes et des mouvements mis en scène par un auteur qui se réclame de toute technique de danse, et constituant une œuvre dénommée soit ballet, soit pièce. L'auteur est le chorégraphe, l'œuvre, la chorégraphie. Cette acception du mot est relativement récente puisqu'elle date de la fin du xixe siècle, mais reste très relative dans la mesure où le « chorégraphe » ne règle pas alors l'ensemble d'un ballet mais seulement les déplacements du corps de ballet, les morceaux de bravoure ou variations des danseurs principaux étant créés par les solistes eux-mêmes. À cette époque, l'œuvre n'est généralement pas signée, le nom de celui qui l'a composée ne figurant pas sur l'affiche.

C'est le maître de ballet Raoul Auger Feuillet (1675-env. 1730) qui a utilisé pour la première fois le terme chorégraphie, celui-ci désignant alors son système de notation de la danse. Dès son invention, la notation est prévue à des fins de transmission et non de création, comme le signifie Louis XIV à Pierre Beauchamps en 1674, lorsqu'il le charge d'écrire un système de codification et de transmission de la « belle dance », et comme en atteste le titre même de l'ouvrage de Feuillet (reprenant les travaux de Beauchamps), publié en 1700 : Chorégraphie, ou l'Art de décrire la dance par caractères, figures et signes démonstratifs avec lesquels on apprend facilement de soy-même toutes sortes de dances. Un siècle plus tard, cette définition n'a pas changé. En effet, Jean-Georges Noverre, grand théoricien de la danse et « compositeur de ballet » (tel qu'il se nomme lui-même), emploie le terme chorégraphie pour désigner ceux qui notent la danse « à l'aide de différents signes », qu'il juge d'ailleurs dépourvus de talents créatifs : « la chorégraphie amortit le génie ; elle éteint, elle affaiblit le goût du compositeur qui en fait usage ».

Serge Lifar - crédits : Sasha/ Hulton Archive/ Getty Images

Serge Lifar

Si l'usage du terme chorégraphie pour caractériser la création d'une œuvre de danse est tardif, cela semble dû à l'étymologie même du mot qui inscrit l'écriture au sein de ce terme alors que dans les faits, et quelle que soit l'époque de référence, la danse a toujours été créée en partant du mouvement exécuté par les danseurs, et non par écrit. Cela vient également du fait que le mot « danse » désigne à la fois une technique, une pratique sociale et un genre de spectacle. Cette équivoque est renforcée par le fait que la danse classique est un corpus de pas à la terminologie extrêmement précise, un « vocabulaire » qui pourrait laisser penser que, à l'instar du langage, une chorégraphie n'est que l'enchaînement ou l'articulation de ces différents éléments. Ce qui n'est pas le cas, puisqu'elle se préoccupe tout autant d'inscrire ces éléments dans un espace, une durée, un rythme, ainsi que d'inventer de nouveaux pas, voire, à partir du début du xxe siècle, des gestuelles totalement inédites. Conscient que ce terme ne désigne le créateur que par glissement de sens, Serge Lifar, qui publia un Manifeste du chorégraphe en 1935, a finalement préféré le remplacer, dans son ouvrage La Danse (1938), par celui de choréauteur. Il distinguait ainsi non seulement le créateur de l'œuvre dansée de celui qui la transcrit par une notation quelconque (et que l'on appelle de nos jours « notateur »), mais aussi de celui qui la transmet ou l'apprend aux danseurs (et qui est désigné par le terme « maître de ballet »). Néanmoins, ce vocable ne sera guère utilisé que par son promoteur, et les mots chorégraphe et chorégraphie connaîtront un succès croissant durant tout le [...]

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Écrit par

  • : écrivaine, journaliste dans le domaine de la danse

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Média

Serge Lifar - crédits : Sasha/ Hulton Archive/ Getty Images

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