PETZOLD CHRISTIAN (1960- )
Christian Petzold est né en 1960 à Hilden. Depuis son premier téléfilm en 1995, la période la plus difficile pour la production cinématographique allemande de l'après-guerre, il crée des films où le choix de la narration, très souvent fondée sur des intrigues policières ou de thriller, va de pair avec la volonté de donner figure à l'Allemagne contemporaine dans sa complexité. Attentif aux lieux et aux non-lieux de notre modernité (autoroutes, quartiers modernes sans caractère, supermarchés...), il y place ses personnages qui vivent l'évolution de relations humaines dans le capitalisme du tournant du siècle. Refusant les effets stylistiques gratuits, il compose avec deux autres cinéastes formés comme lui à l'Académie allemande du film et de la télévision de Berlin (la D.F.F.B.), Angela Schanelec et Thomas Arslan, le noyau de ce que la critique allemande a dénommé « l'école de Berlin » et la critique française la « nouvelle vague allemande ». Il fait ainsi figure de personnalité centrale de ce groupe de réalisateurs qui ne sont pas réellement une « école », mais ont surtout en commun de refuser les banalités du cinéma commercial allemand et de considérer le cinéma comme un art. Sa reconnaissance à l'étranger a commencé en 2000 avec Contrôle d'identité, un de ses films majeurs : un couple d'anciens terroristes d'extrême gauche, réfugiés au Portugal, retrouvent l'Allemagne d'après la réunification avec leur fille adolescente contrainte d'assumer le poids de l'histoire. Fantômes (2005), Yella(2007), puis Jerichow (2009), une transposition contemporaine du Facteur sonne toujours deux fois, ont été sélectionnés à Berlin ou Venise.
À la frontière
Nouvelle relecture de l'histoire de la R.D.A., Barbara (2012) frappe par sa capacité à assumer très simplement la dimension mélodramatique de son sujet, transposition libre d'une nouvelle de Hermann Broch. L'héroïne, médecin d'un hôpital de Berlin, vient d'être mutée car les autorités ont découvert son intention de fuir en R.F.A. pour rejoindre son amant. Lorsque le film débute, elle commence sa première journée à son nouveau poste dans une petite ville proche de la Baltique sous la surveillance de la Stasi et du jeune collègue qui leur sert d'indicateur. Linéairement, avec une force sourde, l'intrigue va montrer comment Barbara devra s'habituer à son nouvel environnement professionnel, subir les humiliations des contrôles répétés de la police politique, préparer en secret son départ, découvrir l'attraction qu'elle éprouve envers son collègue, s'attacher à une jeune marginale placée en camp de rééducation et, finalement, décider si elle veut vivre à l'Ouest ou lutter à l'Est.
Après le fils aimant du film de Wolfgang Becker qui cache la chute du Mur de Berlin à sa mère, communiste sincère (Good Bye Lenin !, 2003), et l'espion de la Stasi qui finit par protéger les artistes dissidents qu'il surveille dans le film de Florian Henckel von Donnersmarck (La Vie des autres, 2007), la R.D.A. est cette fois incarnée par une femme médecin qui doit décider au début des années 1980 de fuir ou non son pays. Il permet également aux Français de découvrir Nina Hoss, actrice longiligne, devenue en cinq films l'égérie du cinéaste. Elle est le centre de l'œuvre, personnage éponyme et figure plastique en mouvement vers un futur qu'elle doit se choisir. La caméra la suit et caresse ses traits, comme si elle était une héroïne hitchcockienne. Une thématique que Petzold reprendra avec la même actrice dans Phoenix (2014), mais en la situant cette fois sur un autre théâtre : les décombres de l’après-Seconde Guerre mondiale.
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Écrit par
- Pierre GRAS : enseignant en cinéma à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle et à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot
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ONDINE (C. Petzold)
- Écrit par Pierre EISENREICH
- 1 007 mots
- 1 média
Ondine (Undine, 2020) poursuit le renouvellement de l’œuvre cinématographique de Christian Petzold. Après les films marqués par Nina Hoss, sa première actrice de prédilection, le cinéaste allemand le plus talentueux de sa génération réalise, après Transit (2018), son deuxième long-métrage...