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ROCHEFORT CHRISTIANE (1917-1998)

Le nom de Christiane Rochefort demeure fermement lié aux années 1960 et 1970 qui l'ont vue apparaître sur la scène littéraire. De ces années, en effet, des évolutions que connaissait alors la société française – la consommation comme ultime forme de bonheur –, de ses immobilismes tout autant, la romancière s'est faite la contemptrice virulente, volontiers ironique, se taillant dès ses premiers livres une image d'anticonformiste rebelle à l'ordre, aux institutions quelles qu'elles soient, à l'autorité d'où qu'elle émane.

Née le 17 juillet 1917, à Paris, Christiane Rochefort connaît une adolescence et une jeunesse vaguement « désordonnées », selon ses propres termes. Étudiante en psychologie, elle pose pour des peintres pour gagner sa vie – parmi eux, entre autres, Chaïm Soutine –, puis tâte du journalisme à travers la critique cinématographique. Après la guerre, elle devient l'attachée de presse du festival de Cannes, fonction qu'elle occupera durant près de vingt ans, jusqu'en 1968, date à laquelle les organisateurs du festival décident de se séparer d'elle, arguant de sa participation aux troubles qui perturbent la manifestation cette année-là.

À cinquante ans, Christiane Rochefort est déjà un écrivain célèbre. Son entrée en littérature date de 1953, lorsqu'elle publie son premier recueil de nouvelles (Le Démon des pinceaux). Mais c'est la parution, en 1958, du Repos du guerrier qui lui vaut son premier succès public. La romancière y met en scène une jeune femme bourgeoise qui rompt avec son époux et son milieu, pour vivre une intense liaison sexuelle avec un alcoolique. Le livre, jugé pornographique par certains critiques, fait scandale et voit sa sulfureuse notoriété s'accroître après l'adaptation à l'écran qu'en donne quatre ans plus tard Roger Vadim, avec Brigitte Bardot en tête d'affiche.

Entre-temps, un nouveau roman est venu confirmer la réputation d'écrivain contestataire et iconoclaste qui ne quittera plus Christiane Rochefort. En 1961, en effet, paraît Les Petits Enfants du siècle où l'écrivain choisit pour narratrice une toute jeune adolescente qui grandit dans une cité de la banlieue parisienne et y fait ses premières expériences de la vie. Écrit dans une langue qui s'attache à demeurer proche du langage parlé, l'ouvrage choque une nouvelle fois, par la liberté des pensées et la verdeur du vocabulaire que Christiane Rochefort imagine pour son héroïne, également par la vision sans complaisance de la médiocrité de l'existence dans les grands ensembles urbains qui est ici dénoncée.

La suite de la bibliographie de la romancière confirmera son esprit frondeur, son goût pour des thématiques susceptibles de bousculer la tranquillité d'esprit d'une société française qu'elle juge bâtie sur l'hypocrisie des conventions et des interdits moraux, sur l'injustice sociale, sur des formes multiples d'oppression dont sont victimes les femmes (Les Stances à Sophie, 1963), les enfants (La Porte du fond, prix Médicis 1988), les classes sociales défavorisées, ainsi que tous ceux que leur choix de vie contraint à la marginalité (les homosexuels dans Printemps au parking, 1969).

Ces thèmes, Christiane Rochefort les développera aussi dans des essais, le plus célèbre étant Les Enfants d'abord (1976), et dans son autobiographie, Ma Vie revue et corrigée par l'auteur (1978). Militante, on l'a vue également contribuer à la création en 1971 du mouvement féministe Choisir, avec Gisèle Halimi et Simone de Beauvoir, entre autres. En 1997, elle publie deux ultimes recueils, Adieu Andromède et Conversations sans paroles.

— Nathalie CROM

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Écrit par

  • : responsable des pages littéraires du journal La Croix

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