NOLAN CHRISTOPHER (1970- )
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Un prince du blockbuster
Quelle est donc la « recette Nolan », cette capacité à penser un cinéma ambitieux artistiquement et fortement commercial ? Le réalisateur est d’abord un conteur, qui tire moins le spectacle du côté de l’action que de la narration. Il découpe presque toujours ses films en plusieurs segments, parfois décalés chronologiquement et qui se répondent les uns les autres. Dès Memento, la dimension de puzzle du récit est mise en place, le plaisir provenant ici de la manière dont les pièces s’emboîtent pour dessiner l’image finale, qu’il s’agisse de la tragédie personnelle d’Oppenheimer, de celle, historique, de Dunkerque ou encore du plan diabolique du Joker dans Batman Begins.
Ce plaisir narratif est équilibré par la gravité dramatique qui marque les protagonistes de ses œuvres. Depuis le héros amnésique de Memento, qui s’interroge sur le sens d’actions dont il ne peut se souvenir, jusqu’à Oppenheimer, ce savant confronté à la réalité oppressante qui découle de ses décisions, la responsabilité morale figure au cœur de toutes ses créations. C’est encore plus vrai dans Insomnia, seul remake filmé par Nolan, construit autour de la culpabilité et des remords qui hantent le personnage central, l’inspecteur de police incarné par Al Pacino.
Prince moderne du blockbuster, capable d’une considérable variété de registres, Nolan est au fond un cinéaste antihéroïque, qui questionne sans relâche l’idée même du sauveur traditionnel hollywoodien. C’est aussi un prestidigitateur qui sait magistralement brouiller les pistes, au risque de s’égarer, comme dans Tenet (2020), seul échec public du réalisateur.
Après le triomphe d’Oppenheimer, Nolan a confié qu’il continuerait à concevoir des films à gros budget, estimant être l’un des rares réalisateurs en activité à Hollywood capable de bénéficier de pareils financements pour ses œuvres.
À l’instar des grands cinéastes hollywoodiens, dans une lignée qui partirait de David W. Griffith et passerait par John Ford, Stanley Kubrick ou Steven Spielberg, Christopher Nolan est suivi aussi bien par les spectateurs que par les critiques. Ainsi, à l’heure du streaming et du règne des séries, ce défenseur acharné des salles de cinéma préserve la flamme d’un cinéma exigeant et populaire, à la fois international et très américain.
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Écrit par
- Pierre Simon GUTMAN : docteur en histoire et esthétique du cinéma à Paris-VII Denis-Diderot, rédacteur en chef adjoint de l'Avant-scène cinéma, professeur en mise en scène et histoire du cinéma à l'École supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) Paris et Bruxelles
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