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CHRONIQUES D'ART, 1902-1918, Guillaume Apollinaire Fiche de lecture

Moins connue que son œuvre littéraire, l'activité de critique d'art de Guillaume Apollinaire (1880-1918) occupe une place importante dans l'ensemble de son œuvre, à la fois parce qu'il a été l'un des premiers à défendre la plupart des protagonistes de l'avant-garde européenne et parce que sa démarche de critique (critique d'arts plastiques et critique littéraire) est proche de sa production personnelle. Plus subjectif et plus lyrique qu'il n'est intellectuel ou théoricien, Apollinaire a su reconnaître très tôt l'importance d'un Picasso ou d'un Matisse, et sa critique par petites touches, tantôt lyrique, tantôt directe et volontairement simple, souvent journalistique, rappelle certains des caractères de son œuvre de prosateur ou de poète. C'est en les replaçant dans la tradition française des écrivains-critiques que doivent être abordées les Chroniques d'art, 1902-1918, et non comme un recueil de préceptes sur l'art de son temps ou comme une réflexion autonome.

Le chroniqueur des Salons parisiens

Les premiers textes repris dans l'ouvrage ont été publiés en 1902, soit dans La Revue blanche (Apollinaire, qui est alors à Berlin, une ville qu'il n'apprécie guère, décrit avec enthousiasme sa visite au musée du Pergamon), soit dans L'Européen. Les derniers s'arrêtent à la mort d'Apollinaire en 1918. L'ouvrage ne comprend pas les écrits sur l'art publiés en volume du vivant de l'artiste comme Les Peintres cubistes (1913).

Pour un lecteur habitué à des essais ou à des écrits plus élaborés sur l'art, ou aux textes de plasticiens tels que Matisse, Léger, Mondrian ou Kandinsky – pour prendre des artistes appréciés d'Apollinaire – l'ensemble des Chroniques pourra sembler fastidieux, et même décevant. Les contributions d'Apollinaire à des quotidiens comme L'Intransigeant (où il tint la rubrique « La Vie artistique » de 1910 à 1914) ou Paris-Journal, à des revues comme Les Soirées de Paris ou Le Mercure de France étaient celles d'un journaliste, et l'on ne peut donc s'étonner du ton anecdotique de ses textes, des sentences rapides et subjectives (« Je trouve ce tableau détestable »), du traitement lapidaire des œuvres commentées, quelle que soit l'importance de l'artiste évoqué. Mais ce sont précisément les comptes rendus réguliers des différents Salons – Société nationale, Salon des indépendants, Artistes français, Salon d'automne –, des rétrospectives et des expositions en galerie qui permirent à Apollinaire de suivre pas à pas l'évolution des arts. Apollinaire n'a certes pas l'audace théorique d'un Charles Baudelaire ou d'un Paul Valéry, ou la verve d'un F. T. Marinetti, mais il possède la qualité primordiale du critique qui est de savoir déceler les talents, discerner les nouvelles tendances, repérer dans la masse des productions artistiques les artistes de premier plan.

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Écrit par

  • : professeur en esthétique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, critique d'art

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