CI [TS'EU], genre littéraire chinois
L'épanouissement
Conscient d'une évolution du ci vers l'artificialisation, Liu Yong (vers 1045) va s'efforcer de retourner aux origines populaires et musicales du genre. Son effort sera poursuivi par Qin Guan (1049-1101) et He Zhu (1063-1120) et aboutira au formalisme de Zhou Bangyan (1056-1121) et de Li Qingzhao (1084-apr. 1151).
En marge de ce courant orthodoxe se situe Su Shi (1036-1101). Son apport consiste surtout à varier les thèmes, limités jusqu'alors aux chagrins d'amour, à la tristesse de la séparation ou au plaisir. À la délicatesse, voire à la mièvrerie, qui avait caractérisé les ci des Cinq Dynasties, à la vulgarité de ceux de Liu Yong il préfère un style plus puissant et libre[hao fang] :
Le vaste fleuve coule vers l'est, Ses flots effacent le souvenir [des grands hommes d'autrefois. → Les rocs enchevêtrés déchirent les nuages, La houle effrayante lacère le rivage Et fait se lever la neige en monceaux. Paysage comme un tableau, Berceau des héros de jadis.
Mais les innovations instaurées par Su Shi n'ont guère d'influence sur les poètes de son époque, alors même que triomphe l'école formaliste. Celle-ci, pour remédier à l'appauvrissement des thèmes et des images, cherche une voie dans l'élaboration de règles prosodiques compliquées et dans le cisèlement des vers. Il faut attendre l'invasion du pays par les Jin et la chute de la capitale (1126) pour voir apparaître, annonçant la fin du mouvement formaliste, des disciples de Su Shi. Aux quatre coins de l'Empire souffle alors un esprit patriotique, qui se retrouve dans les œuvres de Yue Fei (1103-1141), de Xin Qiji (1140-1207) et de Lu You (1125-1210).
Désormais, le ci ne sera plus utilisé par les poètes pour exprimer exclusivement des sentiments amoureux, il se fera aussi le véhicule de leurs nobles aspirations (zhi).
Cette évolution contribue à détacher davantage le ci de la musique.
Sous la dynastie des Qing (1644-1911), le mouvement pour une renaissance littéraire touche le ci. Les poètes imitent les œuvres du passé, prenant leurs modèles dans le Recueil parmi les fleurs, dans les recueils des grands poètes des Song. Mais, si leurs poèmes s'approchent de la perfection, ils n'ont plus rien de commun avec la chanson populaire qu'était le ci à ses débuts.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Chantal CHEN-ANDRO : maître de conférences honoraire
Classification
Autres références
-
CHINOISE (CIVILISATION) - La littérature
- Écrit par Paul DEMIÉVILLE , Jean-Pierre DIÉNY , Yves HERVOUET , François JULLIEN , Angel PINO et Isabelle RABUT
- 47 512 mots
- 3 médias
Mais c'est surtout dans un genre poétique nouveau que brille la poésie des Song. Il s'agit duci, mot qui signifie « parole, expression, texte », et qui sous les Song s'appliquait à un genre particulier de poèmes adaptés aux mélodies musicales sur lesquelles on les composait, comme nous disons les... -
LI QINGZHAO [LI TS'ING-TCHAO] ou LI YI'AN [LI YI-NGAN] (1081-apr. 1151)
- Écrit par Chantal CHEN-ANDRO
- 413 mots
Li Qingzhao, appelée aussi Li Yi'an, est originaire de Jinan au Shandong. En 1101, elle épouse Zhao Mingcheng, étudiant au Collège impérial. Tous deux appartiennent à d'illustres familles de fonctionnaires-lettrés et ont une passion commune : la collection d'objets rares. En 1103, Mingcheng obtient...
-
LIU YONG [LIEOU YONG] (XIe s.)
- Écrit par Chantal CHEN-ANDRO
- 311 mots
Liu Yong, appelé aussi Liu Qiqing, est originaire de Chong'an dans la province du Fujian. Il est difficile de connaître avec précision les dates de naissance et de mort de ce poète. On sait seulement qu'il obtient le titre de docteur accompli (jinshi) en 1034 et qu'après ce succès il...
-
LIU YUXI [LIEOU YU-SI] (772-842)
- Écrit par Yves HERVOUET
- 570 mots
Liu Yuxi n'est pas un des grands noms de la poésie chinoise classique, mais une demi-douzaine de ses poèmes, nous dit un critique moderne sévère, lui ont permis de survivre à l'oubli. Sa vie est à la fois banale et intéressante parce que typique de son époque. Entré dans l'administration impériale...
- Afficher les 10 références