CINÉMA (Aspects généraux) Histoire
Le cinéma mondial de la guerre à l'après-guerre
La France, de la poésie à la littérature
Sous l' Occupation, le cinéma français devient inévitablement un cinéma d'« évasion ». Les Allemands ont offert leurs capitaux pour maintenir une production française. Mais, pour la contrôler, ils ont créé aussi le Centre national du cinéma qui a survécu à l'Occupation, à la Libération, et par lequel le gouvernement continue à surveiller le cinéma français. Pourtant, malgré de grandes difficultés, le cinéma français continue à vivre au mépris de la tutelle des occupants.
Rompant avec le réalisme d'avant guerre s'affirme une veine poétique avec Le Mariage de Chiffon (1942) et Douce (1943) de Claude Autant-Lara, et La Nuit fantastique (1942) de Marcel L'Herbier. Elle s'épanouira au lendemain de la guerre dans les œuvres maîtresses de Cocteau : La Belle et la Bête (1946), Orphée (1950).
Parallèlement se manifeste une inspiration historique motivée par le même impératif d'évasion. Marcel Carné tourne Les Visiteurs du soir (1942) et Les Enfants du paradis (1943).
Pourtant, bien qu'il soit difficile d'envisager un cinéma en prise sur l'actualité, un courant réaliste reprend fidèlement la tradition du meilleur cinéma d'avant guerre. Elle est représentée par celui qui fut l'assistant de Renoir et qui sera l'un des cinéastes les plus marquants de l'après-guerre : Jacques Becker (1906-1960). Avec Goupi Mains-Rouges (1943), celui-ci entreprend cette ambitieuse « Comédie humaine » qui va, de film en film, tenter une peinture de la société française, de ses classes, de ses milieux, de ses générations. Goupi Mains-Rouges nous plonge dans le monde paysan, Antoine et Antoinette (1947) dans le peuple de Paris ; Rendez-vous de juillet (1949) est le premier document juste sur la jeunesse de Saint-Germain-des-Prés ; Édouard et Caroline (1951) décrit, dans un style très proche de la comédie américaine, la grande bourgeoisie parisienne ; mais, surtout, Casque d'or (1952), sur les truands de la Belle Époque, reste le chef-d'œuvre de Becker et l'un des joyaux du cinéma français. Becker disparaîtra prématurément en 1960, alors qu'il achevait Le Trou, et que la « nouvelle vague » – qui lui devait tout – faisait son entrée en scène. Jean Grémillon (Lumière d'été, 1942 ; Le ciel est à vous, 1943) est le second artisan de cette veine réaliste.
En marge de ces courants s'impose la figure de celui qui va être le plus grand cinéaste français de l'après-guerre : Robert Bresson. Les Anges du péché (1943), Les Dames du bois de Boulogne (1945) étonnent avant de rencontrer, difficilement, leur public. Cocteau et Becker se font les défenseurs ardents et lucides de Robert Bresson au début de sa carrière.
Après le départ des Allemands, la production américaine tente d'envahir le marché français. Pour affronter cette concurrence, les producteurs français jouent la carte de la qualité et décident de conquérir le public bourgeois réfractaire aux westerns et aux films hollywoodiens en général. C'est la grande ruée vers la littérature, l'âge d'or du cinéma d' adaptation dont le trio Aurenche - Bost - Autant-Lara se fera une spécialité. Sacrifiant aux impératifs de cette mode, plusieurs cinéastes vont donner de grandes œuvres : Robert Bresson adapte Le Journal d'un curé de campagne de Bernanos (1950). Max Ophüls (1902-1957), rentrant d'Amérique, adapte trois nouvelles de Maupassant (Le Plaisir, 1951) et une nouvelle de Louise de Vilmorin (Madame de..., 1953). Mais son chef-d'œuvre, totalement incompris à l'époque, sera son dernier film : Lola Montès (1954).
En marge, comme Bresson, Jacques Tati invente un nouveau comique avec Jour de fête (1948) et Les Vacances de M. Hulot (1952).[...]
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Écrit par
- Marc CERISUELO : professeur d'études cinématographiques et d'esthétique à l'université de Paris-Est-Marne-la-Vallée
- Jean COLLET : docteur ès lettres, professeur à l'université de Paris-V-René-Descartes, critique de cinéma
- Claude-Jean PHILIPPE : journaliste
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