CINÉMA (Aspects généraux) L'industrie du cinéma
Les problèmes économiques soulevés
Les coûts et la dispersion des budgets
Chaque film est un produit unique, différencié. Il y a donc autant de budgets de films que de réalisations, et ces budgets présentent une dispersion très élevée. Leur montant est subordonné aux ambitions esthétiques et commerciales des producteurs. Il dépend également de la conjoncture économique et des conditions nationales et internationales de concurrence.
De nombreuses autres contraintes pèsent sur la production cinématographique. Elle n'est pas continue et oblige donc à la constitution d'équipes réunies pour la réalisation d'un seul film et dispersées à l'issue du tournage. Elle n'emploie pas une force de travail permanente, mais des personnels régis par contrat pour la durée de réalisation du film. Les cachets des interprètes et du personnel de production prennent en compte le caractère temporaire et souvent intense des efforts demandés. Cette situation contribue déjà structurellement au surpaiement des services. Il faut ajouter à cela d'autres éléments : la notoriété des vedettes, le savoir-faire des éléments de l'équipe (scénariste, dialoguiste, réalisateur, éclairagistes, photographes, décorateurs, compositeur). À certains niveaux de qualité, le producteur ne traite du reste que sur des marchés du travail oligopolistiques : quelques acteurs et actrices, un nombre réduit de grands réalisateurs, de photographes et de scénaristes. Dans un contexte d'emploi intermittent et instable, ces derniers cherchent à maximiser leur rémunération en négociant au plus haut prix leurs prestations. Au bout du compte, environ la moitié des budgets de production français (et ce pourcentage est encore supérieur dans les films américains) est consacrée à la rémunération de la main-d'œuvre de toutes qualifications.
Plus généralement, la répartition des coûts de production semble rester très stable dans le temps. Les postes « studios » et « extérieurs » ont subi des évolutions contraires, mais elles ont résulté de l'évolution des pratiques cinématographique issues de la nouvelle vague et favorisant le travail en extérieur au détriment du tournage en plateau.
Aux États-Unis, les producteurs ont toujours pratiqué une politique de hauts budgets comme un moyen de domination des marchés cinématographiques. Cependant, jusqu'à l'apparition de la télévision, cette stratégie était diversifiée. Les grands studios hollywoodiens réalisaient deux types de films : les films A, à grand spectacle, et les films B, moins coûteux et plus rapidement tournés. Les firmes répartissaient leurs frais fixes (studios-contrats longs) sur l'ensemble des productions A et B et ajustaient le niveau de leur offre en jouant sur la part réservée alternativement aux films A et B en fonction de la conjoncture des marchés du film.
La concurrence de la télévision a provoqué d'importants changements : la disparition des grands studios, le démantèlement de l'organisation industrielle, la diminution du nombre des productions. Par suite des démembrements consécutifs à l'application de la réglementation antitrust, les nouvelles firmes n'ont plus eu la possibilité d'alimenter de grands circuits de salles, car ils avaient été cédés ou dispersés. Elles ont alors diminué de manière drastique leur offre et ont eu progressivement tendance à se lancer dans des superproductions (blockbusters) en estimant que le profit d'un film pouvait être proportionné à la dimension de son budget, les films les plus coûteux procurant souvent les plus grosses recettes. Les énormes dépenses développent une psychologie de masse qui provoque un appel auprès des exploitants et du public, et les producteurs américains semblent considérer qu'il est plus difficile de réaliser une petite production profitable que de réussir une[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre-Jean BENGHOZI : directeur de recherche au centre de recherche en gestion de l'École polytechnique
- Daniel SAUVAGET : économiste, critique de cinéma
Classification
Médias
Autres références
-
ACTEUR
- Écrit par Dominique PAQUET
- 6 815 mots
- 2 médias
Aux débuts du cinéma, l'acteur ne paraît pas un instant différent de l'acteur de théâtre. Car ce sont les mêmes qui, dans les premiers films de Méliès, interprètent les textes classiques. De même, dans le cinéma expressionniste, la technique de monstration et de dévoilement de l'expression appartient... -
AFRICAINS CINÉMAS
- Écrit par Jean-Louis COMOLLI
- 1 131 mots
L'histoire des cinémas africains se sépare difficilement de celle de la décolonisation. Il y eut d'abord des films de Blancs tournés en Afrique. Puis, à partir des années soixante, les nouveaux États africains ont été confrontés au problème de savoir quel rôle, quelle orientation, quels...
-
ALLEMAND CINÉMA
- Écrit par Pierre GRAS et Daniel SAUVAGET
- 10 274 mots
- 6 médias
Le cinéaste Volker Schlöndorff a suggéré que l'histoire du cinéma allemand était faite d'une série de ruptures esthétiques mais aussi d'une grande continuité dans le domaine de l'industrie cinématographique. L'alternance entre les phases les plus inventives, comme celles des années 1918-1933, voire...
-
AMENGUAL BARTHÉLEMY (1919-2005)
- Écrit par Suzanne LIANDRAT-GUIGUES
- 758 mots
L'œuvre d'écrivain de cinéma de Barthélemy Amengual est considérable, autant par sa quantité (une douzaine d'ouvrages et une multitude d'articles) que par l'acuité de son propos. Comparable aux meilleurs analystes français de sa génération (tels André Bazin ou Henri...
- Afficher les 100 références