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CINÉMA (Aspects généraux) Les cinémathèques

La constitution d'archives cinématographiques

L'arrivée du parlant (dès 1927 aux États-Unis, en 1929 en France) fut considérée comme une régression catastrophique par la plus grande partie de ces passionnés du film silencieux. Avec l'introduction du son, l'industrie et les gros bataillons du public imposèrent leur loi. On reconstruisit les studios et des salles de plus en plus vastes. Le film muet est mort en l'espace d'une saison. Non seulement en 1930 on cesse d'en produire, mais les stocks existants sont envoyés à la casse. C'est pour tenter de préserver la mémoire des œuvres (c'est la tâche des historiens du cinéma qui, tel Georges Sadoul, commencent dans les années 1930 à penser le cinéma comme histoire), mais aussi les œuvres elles-mêmes, que des amateurs se muent en collectionneurs et posent les bases des premières cinémathèques.

Certes l'idée d'archiver des films « pour la mémoire du monde » n'est pas neuve. Dès 1898, Boleslaw Matuszewski, un Polonais vivant à Paris, avait proposé de créer « un musée ou un dépôt cinématographique » pour « donner à cette source peut-être privilégiée de l'histoire la même autorité, la même existence officielle, le même accès qu'aux autres archives ». Après lui, des projets de musée du cinéma ou d'archives spécialisées ont un temps attiré l'attention. En Allemagne, en Angleterre et en France, les militaires ont mis à l'abri leurs images de la guerre mondiale. Mais rien de décisif n'a été entrepris avant la disparition du film muet.

C'est à Stockholm que naît, en octobre 1933, la première cinémathèque moderne, le Svenska Filmsamfundet, à l'initiative d'un journaliste, Bengt Idestam-Almquist, qui, soutenu par quelques mécènes, archive les films de l'âge d'or du cinéma suédois ainsi que des documents, photos, affiches ou scénarios. Un an plus tard, en novembre 1934, Joseph Goebbels installe à Berlin le Reichfilmsarchiv. En 1935, le gouvernement anglais met en place au sein du British Film Institute une section spécialisée dans la conservation des œuvres cinématographiques, la National Film Library. À New York la même année, ce sont les administrateurs (the board of trustees) du musée d'Art moderne qui décident, à la demande d'Iris Barry, de créer un département du film au sein de leur institution. Quatre archives donc : deux sont d'initiative privée, deux sont l'émanation d'un État. Ce dualisme met en évidence la question du statut de l'archive, qui empoisonne encore soixante-cinq ans après sa création l'existence même de la Cinémathèque française.

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Écrit par

  • : professeur d'histoire, historien de cinéma, président de l'Association française de recherche sur l'histoire du cinéma

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