ESPAGNOL CINÉMA
On peut faire remonter à 1896 les premières manifestations cinématographiques en Espagne. Le 15 mai, un représentant des frères Lumière organise la première projection à Madrid et, à la fin de l'année, un Espagnol filme La Sortie de la messe de midi à l'église du Pilar de Saragosse. L'année suivante, Fructuoso Gelabert construit la première caméra espagnole et met en scène le premier film de fiction, Riña en un café. Parallèlement à ce qui se produit dans d'autres pays d'Europe s'ouvre une époque d'adaptations théâtrales et littéraires, tandis qu'est créée en 1910, à Barcelone, la première revue de cinéma, Arte y Cinematografía. Jusqu'à la fin du cinéma muet, les dates et les films importants sont : La Malquerida, de Ricardo de Baños (1915), La Fête du pigeon,de José Buchs (La Verbena de la paloma, 1921), La Casa de la Troya (A. P. Lugín. 1925), Le Nègre qui possédait une âme blanche,de Benito Perojo (El negro que tenía el alma blanca, 1926) et, surtout, Le Village maudit (La Aldea maldita, 1930), de Florian Rey.
La fin du cinéma muet marque une première rupture dans l'histoire du cinéma espagnol. D'un côté, deux Espagnols, Luis Buñuel et Salvador Dalí, commencent à Paris une carrière prestigieuse, qu'ils poursuivront ailleurs. De l'autre, la crise de 1929 sonne le glas d'un cinéma national au profit de films espagnols tournés à Hollywood ou à Joinville par la Paramount. De cette colonisation par le capital américain, le cinéma espagnol ne sortira jamais tout à fait. La lutte contre ce cinéma espagnol tourné à l'étranger (c'est l'époque des grandes stars comme Imperio Argentina et Carlos Gardel) prend, en 1931, la forme d'un Congrès hispano-américain de cinématographie, en 1932, celle de la réalisation du premier film parlant vraiment espagnol et, la même année, de la présentation au palais de la presse de Madrid de Terre sans pain (Las Hurdes), de Buñuel, dont l'auteur lit le commentaire depuis la cabine de projection. Ce film, l'un des trois tournés en Espagne par le plus grand nom du cinéma espagnol (les deux autres étant Viridiana, en 1961, et Tristana, en 1969), est en rupture violente avec le cinéma dominant de l'époque.
En 1936 éclate la guerre civile, et le cinéma, lui aussi, se divise en deux. Du côté nationaliste, les gloires nationales se retrouvent à Berlin (Imperio Argentina et Florian Rey) en un Centro de producción española qui produit quelques films de prestige comme Carmen de la Triana, de F. Rey (1938), ou Le Barbier de Séville, de B. Perojo (1938), tandis que, en Espagne même, trois films de propagande sont tournés (La Gran Victoria de Teruel, Frente de Aragón, Santander para España). Du côté républicain, des cinéastes, soit à Madrid (Antonio Momplet, Ignacio Iquino, Armando Guerra), soit à Barcelone (Salvador Alberich), se servent du cinéma dans leur lutte. De son côté, le Syndicat unique des spectacles publics de la C.N.T. réalise des films de combat (Castilla libertaria, Aurora de Esperanza, 1937).
Entre 1939 et nos jours, le cinéma espagnol a subi différentes métamorphoses :
– De 1939 à 1951, le franquisme se manifeste dans un cinéma d'exaltation des valeurs nationales et même raciales, conjointement avec un cinéma d'évasion et de divertissement (comédies larmoyantes et films religieux). Les grands noms du cinéma franquiste sont José Luis Saenz de Heredia (La Raza, 1942 ; Franco, ese hombre, 1964) et Juan de Orduña (A mi la legion, 1942 ; La Folie de l'amour, Locura de amor, 1948). En 1943 est créé le No-Do (Noticias y Documentales cinematográficos), seul organe d'information autorisé par l'État et étroitement lié à lui. Quant au cinéma d'évasion, il se présente sous plusieurs formes : adaptations théâtrales, comédies musicales avec Sarita Montiel ou l'enfant Joselito,[...]
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Écrit par
- Jean-Louis COMOLLI : réalisateur et critique de cinéma
Classification
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