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CINÉMA (Réalisation d'un film) Montage

L'évolution du montage

Contrairement à ce que l'on pouvait attendre, le montage ne disparut pas avec la nouvelle vague, fille de Bazin et de Rossellini. Orson Welles, dans son film manifeste, Citizen Kane (1941), utilisait déjà aussi bien le plan-séquence et la profondeur de champ mais aussi toutes les ressources anciennes et nouvelles du montage. Depuis la guerre, et plus encore depuis la fin des années 1960, le montage est soumis à une double postulation. La publicité, comme le vidéo-clip, et tout un cinéma « à effets » issus de ces écoles suivent sans état d'âme la voie ouverte par les Français (rythme, musique) et les Russes (labourer le psychisme). En 1958-1959, À bout de souffle, de Jean-Luc Godard, et Hiroshima mon amour, d'Alain Resnais, ont proposé une autre conception du montage, plus conforme à celles de Rossellini qu'à celles d'Eisenstein : un montage ouvert aux aléas du réel, qui ne nie pas les contradictions mais les renforce, qui ne cherche pas à faire sens, à imposer une signification (une idéologie) mais à désigner, dans leurs manifestations les plus infimes, les béances de sens de la réalité, voire son « insignifiance » fondamentale. Le montage ne vise pas à « informer » – dans tous les sens du mot – le réel, mais à en manifester les formes, voire les déformations. Welles, encore, en a fait ironiquement la théorie dans Vérités et Mensonges (1974), et Godard l'utilise dans ses Histoire(s) du cinéma. Le montage ne consiste plus à serrer les boulons dans la phase terminale du film, mais à « jouer », au sens ludique du terme comme au sens mécanique (laisser du jeu dans les rouages du film). Cette révolution de la fonction du montage correspond à l'évolution de « l'image-mouvement » à « l'image-temps » telle que la pense Gilles Deleuze. Le montage ne renforce plus le lien entre l'homme, le film et le monde ; il prend acte de leur séparation et en accentue les failles.

Citizen Kane, O. Welles - crédits : Keystone/ Hulton Getty

Citizen Kane, O. Welles

<it>Citizen Kane</it>, d'Orson Welles - crédits : RKO Radio Pictures Inc./ Collection privée

Citizen Kane, d'Orson Welles

Après Rossellini ou Antonioni, le montage hollywoodien serait-il mort ? L'évolution du montage, tout particulièrement dans le cinéma américain des trente dernières années, montre le contraire. Jerry Schatzberg, Brian De Palma, Francis Ford Coppola, Oliver Stone, Martin Scorsese, John Woo, les frères Coen, Tim Burton, entre autres, ont inventé un montage-choc, rapide, violent, discontinu, qui, à la fois, synthétise et rompt avec les conceptions dictatoriales des Soviétiques, la recherche d'un esthétisme musical propre à l'avant-garde française et la foi d'un André Bazin dans un monde qui se livrerait progressivement à l'observateur passif.

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Médias

Différents plans cinématographiques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Différents plans cinématographiques

Cinéma : montage d'un film - crédits : mixetto/ E+/ Getty Images

Cinéma : montage d'un film

Techniques de montage cinématographique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Techniques de montage cinématographique

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