CINÉMA (Réalisation d'un film) Musique de film
La musique de film, entre décoration et création
Les divers problèmes posés par la musique de film depuis les origines demeurent. Le choix d'une forme musicale, de sa tonalité et de sa coloration instrumentale, celui des emplacements de ses interventions et de leur fréquence, de la relation de la musique aux images, se posent toujours. En dépit des efforts d'un grand nombre de musiciens qui ont pris au sérieux la composition pour le cinéma, la musique « papier-peint » subsiste.
La responsabilité en incombe souvent aux cinéastes, producteurs et réalisateurs. Comme la fonction primordiale de la musique est d'« augmenter la capacité expressive de l'image » (Vsevolod Poudovkine), de fournir une troisième dimension d'importance capitale à une représentation bidimensionelle, elle leur apparaît comme une nécessité, mais n'en demeure pas moins traitée comme une pièce rapportée. En France, par exemple, le compositeur ne dispose le plus souvent que de quatre semaines environ entre la découverte du film en projection et le mixage de la bande-son. En outre, comme la musique, même quand son coût est inscrit au budget, arrive à la fin de la chaîne de fabrication du film, il n'est pas rare que l'argent vienne alors à manquer.
Il existe cependant des collaborations authentiques entre l'auteur du film, qu'il soit producteur ou réalisateur, et le compositeur, faites de conversations, d'échanges d'idées. De fait, quand le film est monté, car il est préférable d'écrire sur l'image définitive en raison de la précision des minutages, le compositeur peut livrer une partition en trois semaines, sous certaines conditions, évidemment, de durée et d'orchestration. Dans certains cas, ainsi celle de Maurice Jaubert avec Jean Lods pour La Vie d'un fleuve (1932), celle de Walter Leigh avec Basil Wright pour Song of Ceylan (1935), de Serge Prokofiev avec Sergueï Eisenstein pour Alexandre Nevski (1938), de Bruno Coulais avec Claude Nuridsany et Marie Pérennou pour Microcosmos (1996), la collaboration fut à ce point étroite que le montage de certaines scènes fut retravaillé en fonction de la musique. C'est là une pratique exceptionnelle qui ne peut guère être étendue : en dehors même des contingences financières, elle se révélerait inexploitable selon les types d'écriture filmique et la fonction qu'on entend faire jouer à la musique, et son emploi se révélerait abusif. Toutefois, elle montre combien la musique peut être un élément organique du film.
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Écrit par
- Alain GAREL : critique et historien de cinéma, professeur d'histoire du cinéma
Classification
Médias
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