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AFRICAINS CINÉMAS

L'histoire des cinémas africains se sépare difficilement de celle de la décolonisation. Il y eut d'abord des films de Blancs tournés en Afrique. Puis, à partir des années soixante, les nouveaux États africains ont été confrontés au problème de savoir quel rôle, quelle orientation, quels moyens donner au cinéma. Problème technique mais avant tout problème politique : celui de la possibilité de promouvoir un cinéma national.

Si l'on excepte l'Égypte, pays producteur et exportateur de films depuis les années trente, l'Afrique n'est jusqu'à la Seconde Guerre mondiale qu'un décor. La « découverte » de l'Afrique va précéder celle des Africains. Il en est ainsi pour La Croisière noire de Léon Poirier (1926), pour La Grande Caravane de Jean d'Esme (1936) ou pour les films réalisés dans l'ex-Congo belge par André Cauvin (Équateur aux mille visages, 1949). Des films plus ambitieux comme Le Voyage au Congo de Marc Allégret (1927, sur le voyage de Gide) n'échappent pas à cette volonté d'illustration. Cependant, de plus en plus, des cinéastes non africains vont (parfois dans des conditions difficiles : guerre, illégalité) populariser et faire avancer le combat pour l'indépendance. C'est le cas du Français René Vautier qui réalise pour le F.L.N. L'Algérie en flammes, comme il avait en 1950 réalisé illégalement en Côte-d'Ivoire Afrique 50. C'est aussi le cas de l'Américain Lionel Rogosin et du Danois Henning Carlsen, l'un avec Come Back Africa (1959) et l'autre avec Dilemme (1962) qui témoignent sur la condition des Noirs victimes de l'apartheid en Afrique du Sud. D'une façon moins risquée, d'autres cinéastes font connaître sinon les luttes, du moins la vie quotidienne des Africains. C'est Richard Leacock et son court métrage Kenya (1961) ou Sean Graham qui tourne au Ghana en 1952 The Boy Kumasena. Au même moment, en dépit de leurs ambiguïtés, les films ethnologiques ont l'avantage de mettre l'accent sur la vie concrète des Africains, ce qui rompt dans une certaine mesure avec la vieille image mystifiante de l'Afrique. Ethnologue et cinéaste, Jean Rouch, est déjà l'auteur des Maîtres fous (1956), de Jaguar (1956), de La Chasse au lion à l'arc (1965) ; lorsqu'il intitule un de ses films Moi, un Noir (1959), il désigne la limite de ce qu'il peut faire et le moment où il revient aux Africains eux-mêmes de prendre la caméra.

L'indépendance politique acquise, la question du cinéma africain se pose en termes nouveaux : que vont décider les nouveaux États ? Car la distribution des films continue à être assurée par des compagnies étrangères dont la toute-puissante M.P.E.A.A. américaine. L'Afrique francophone () est contrôlée par deux sociétés françaises : la Comacico et la Cecma. À cela s'ajoute la quasi-inexistence, héritée de l'époque coloniale, de toute infrastructure (studios, techniciens) permettant la production des films. Le combat pour un cinéma national qui corresponde, de la conception à la consommation, à la culture et aux besoins africains ne fait que commencer. À partir de 1960, ce combat a souvent pris la forme de la nationalisation, avec des bonheurs divers.

La nationalisation provient (mais pas toujours) d'une inspiration politique. Elle implique que le gouvernement ait une vision d'ensemble des problèmes du cinéma. L'orientation est dans ce cas plus volontiers tournée vers le didactisme, le documentaire. Par exemple, en Guinée, le film de M. L. Akin Le Sergent Bakary Woulen parle de la tradition du mariage forcé. En Algérie, après une première période de films de prestige consacrés à la guerre de libération (notamment La Bataille d'Alger, 1966, tournée par G. Pontecorvo pour Yacef Saadi), on a vu éclore un cinéma [...]

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