CINÉTIQUE CHIMIQUE
Étant donné un système chimique comprenant des composés chimiques, dans un état physique quelconque et répartis selon une localisation quelconque, on dira que ce système est chimiquement inerte si aucun des composés présents ne se transforme dans sa nature chimique. Dans le cas contraire, on est en présence d'un système réactionnel qui subit une transformation chimique. Si les composés se transforment dans un rapport fixe et défini en un système de produits, on dira que la transformation ne comporte qu'une réaction chimique.
Le but premier de la chimie, minérale ou organique, fut longtemps et demeure souvent l'identification, l'isolement des composés chimiques obtenus lors des transformations ; l'objectif est alors de connaître tous les composés auxquels peut conduire la chimie, et le mode opératoire et le déroulement même de la transformation ne sont pris en considération qu'en tant que recette de synthèse. L'étude approfondie de la transformation, du « mouvement », de la structure de la matière, tel fut le centre d'intérêt d'un certain nombre de chimistes, qui développèrent cet aspect de la chimie qu'est la cinétique chimique. En un sens, la cinétique chimique regroupe tous les travaux ayant pour finalité de décrire qualitativement ou quantitativement l'évolution des systèmes chimiques, de comprendre le mécanisme selon lequel, au niveau de la molécule, s'opère le réarrangement des liaisons chimiques qui conditionne la réaction, d'expliciter les forces motrices ou antagonistes qui déterminent cette évolution. Notons ici que certains auteurs usent de l'expression « dynamique chimique » dans un sens équivalent à celle de cinétique chimique. Le domaine d'application de la cinétique s'étend à toute évolution de la matière, qu'elle soit très lente ou très rapide, mettant en cause des modifications d'espèces chimiques au sein de celles-ci. Ainsi, prenant comme objet d'étude le système chimique que constitue la matière des espaces intersidéraux, elle explique que les molécules d'hydrogène y sont en équilibre avec des atomes d'hydrogène ; ces atomes, qui dans les conditions normales se recombinent instantanément, ont, en effet, dans les conditions spatiales où la concentration des espèces chimiques se trouve réduite à 104 par litre, des durées de vie qui se chiffrent par milliers d'années, c'est-à-dire qu'ils ne réagissent statistiquement qu'après des durées de cet ordre. Inversement, il est nécessaire de pouvoir étudier des réactions ultra-rapides, recombinaisons de radicaux, neutralisations acide-base, car ce sont des étapes élémentaires des transformations chimiques. Comme le soulignait le professeur M. Eigen dans son allocution de prix Nobel 1967, ces réactions étaient considérées, encore en 1949, comme évoluant à une « vitesse immesurable ». Elles ont été mesurées et étudiées, bien que la transformation des réactifs n'y nécessite que des durées de l'ordre de 10-10 seconde.
Les objectifs de l'analyse cinétique, quoique scientifiques, débouchent sur l'action. Le but de cette science est, en effet, d'observer les transformations pour parvenir d'abord à les décrire, ensuite à énoncer leurs lois, enfin à obtenir les moyens qui permettent de les contrôler. Or la maîtrise de la nature suppose l'aptitude à freiner, à accélérer ou à orienter sa transformation ; accélérer une réaction, c'est ce que l'on veut faire dans un réacteur chimique ; freiner une transformation, c'est pouvoir stabiliser un matériau ou stocker un produit. Ainsi, de l'éthylène pourra d'abord être stocké dans un réservoir parce que l'on a déterminé des inhibiteurs qui empêchent sa dégradation, puis polymérisé en ajoutant un catalyseur qui provoque sa transformation sélective en polyéthylène, celui-ci étant à nouveau stabilisé par[...]
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Écrit par
- Lucien SAJUS : Docteur ès sciences, ingénieur en chef des Mines, directeur général de la Compagnie française d'études et onstruction Technip.
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