CINQUIÈME RÉPUBLIQUE La période post-gaullienne (1969-1981)
Après le départ du général de Gaulle, une nouvelle période s'ouvre pour les institutions françaises : celle de la Ve République sans le soutien de son fondateur. Plusieurs scénarios d'évolution étaient possibles, c'est en fait la confirmation des institutions qui a prévalu. La présidentialisation du régime n'a fait que se renforcer après le départ du général, alors que certains imaginaient un retour à la tradition parlementaire française. De 1969 à 1981, on peut distinguer deux périodes, celle de la continuité sous la présidence de Georges Pompidou, celle de la « petite alternance » avec le septennat de Valéry Giscard d'Estaing.
La continuité du gaullisme avec Georges Pompidou (1969-1974)
Élection de l'héritier du gaullisme
Après l'échec référendaire et après la démission de Charles de Gaulle, Georges Pompidou, l'héritier « naturel » du gaullisme, annonce donc sa candidature à la fonction suprême dès le 29 avril 1969. Il s'assure rapidement le soutien du parti gaulliste, des Républicains indépendants et du groupe centriste Progrès et démocratie moderne. Il veut à la fois être un président dans la continuité du gaullisme mais aussi marquer une certaine ouverture. Si l'unité de candidature se fait facilement à droite, la gauche est au contraire affaiblie et divisée après les événements de 1968. Aucune candidature ne s'impose. Gaston Defferre (S.F.I.O.) va présenter la sienne en tandem avec Pierre Mendès France comme éventuel Premier ministre. Les communistes, ne pouvant accepter un candidat qui refuse toute alliance avec eux, présentent Jacques Duclos, qui avait dirigé l'activité clandestine du parti pendant la Seconde Guerre mondiale. La gauche soixante-huitarde souhaite utiliser l'élection pour populariser ses idées, le Parti socialiste unifié (P.S.U.) présente donc Michel Rocard et La Ligue communiste Alain Krivine. Après beaucoup d'hésitations, Alain Poher, président du Sénat depuis l'automne de 1968, centriste convaincu qui incarne l'opposition au référendum gaulliste de 1969, et qui assume, conformément aux institutions, l'intérim de la présidence de la République (du fait de la démission du général), accepte de se présenter aux suffrages des électeurs, les sondages lui prédisant un très bon score et lui laissant même augurer une possibilité de l'emporter.
La campagne va être très courte, le premier tour de l'élection se déroulant le 1er juin. L'enjeu principal en est le basculement du centre et de la droite traditionnelle : ces électorats vont-ils se porter largement sur Georges Pompidou ou se laisser attirer par Alain Poher ? La différence entre les deux repose surtout sur la vision des institutions. Georges Pompidou incarne l'esprit de la Ve République, il a été pendant six ans le Premier ministre du général de Gaulle, lui imposant même parfois ses solutions (notamment en mai 1968). Alain Poher, qui mène une campagne peu active, dont le programme est très flou, donnant l'image d'un futur président, conciliateur des forces politiques, démocrate raisonnable et modéré, plutôt arbitre que réel leader d'une majorité de gouvernement, baisse dans les sondages tout au long de la campagne tandis que monte Jacques Duclos. Les Français découvrent en ce dernier une personnalité truculente et populaire, il essaie d'incarner l'ensemble des aspirations de la gauche et gomme donc les aspects les plus saillants des positions communistes.
Les résultats du premier tour de scrutin sont très clairs. Georges Pompidou réunit 44,5 p. 100 des suffrages exprimés, ce qui constitue un très beau score, équivalent à celui du général de Gaulle au premier tour de 1965. Alain Poher ne totalise que 23,3 p. 100 des voix, suivi de près par Jacques Duclos (21,3 p. 100). Le second tour oppose donc le candidat[...]
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Écrit par
- Pierre BRÉCHON : professeur émérite de science politique à Sciences Po Grenoble, chercheur au laboratoire Pacte (UMR 5194, CNRS/ université Grenoble Alpes/Sciences Po Grenoble)
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