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CINQUIÈME RÉPUBLIQUE Les années Chirac (1995-2007)

Jacques Chirac - crédits : Diana Walker/ Time Life Pictures/ Getty Images

Jacques Chirac

Les douze années de présidence de Jacques Chirac (1995-2007) ont été marquées sur le plan institutionnel par le raccourcissement du mandat présidentiel à cinq ans, l'inversion du calendrier électoral et le rejet du traité constitutionnel européen. Sur le plan politique, on a assisté à la poursuite des alternances et à des sanctions régulières par les électeurs du pouvoir en place. Élu président en 1995, Jacques Chirac a perdu les législatives de 1997, ce qui a ouvert la voie à une cohabitation de cinq ans entre un président de droite et un Premier ministre de gauche. Le président sortant a été réélu en 2002 pour un second mandat dans des conditions très particulières, la gauche sanctionnée ayant été éliminée du second tour au profit du leader de l'extrême droite. Les élections régionales et européennes de 2004, ainsi que le référendum européen de 2005 ont à nouveau manifesté un désaveu de la droite. Puis, dans une conjoncture marquée par une éruption de violences urbaines en octobre-novembre 2005, un fort mouvement social contre le contrat première embauche (C.P.E.) au printemps de 2006 et un lent recul du chômage, Nicolas Sarkozy réussit à s'imposer en 2007 comme nouveau président, désireux de refonder la politique de la droite.

La longue période de cohabitation que la France a connue de 1997 à 2002 a mis en lumière les risques engendrés par cette situation et favorisé la réduction du mandat présidentiel (dès 2000). Nous traiterons d'abord de celle-ci avant d'aborder les principales élections, de la victoire de Jacques Chirac à la fin de son second mandat.

Durée du mandat et calendrier électoral

Depuis le début de la IIIe République, le mandat présidentiel durait sept ans. Mais jusqu'à l'instauration de la Ve République, le président avait de fait peu de pouvoirs. Le problème de la durée du mandat fut souvent posé depuis les années 1960, beaucoup jugeant celle-ci trop longue : un président doit avoir le temps de mettre en œuvre sa politique mais il doit aussi se soumettre suffisamment souvent au verdict populaire. Georges Pompidou avait fait voter par les deux Assemblées un projet de modification de la Constitution pour réduire le mandat à cinq ans, mais avait ensuite abandonné sa réforme en 1973. Cette question avait depuis lors été souvent rediscutée mais jamais mise en œuvre. Lionel Jospin était favorable à une telle réduction de la durée et l'avait dit pendant la campagne pour l'élection présidentielle de 1995 ; Jacques Chirac n'avait pas alors semblé hostile à cette mesure. Cependant, il avait clairement manifesté son opposition le 14 juillet 1999 : « Le quinquennat conduit presque automatiquement au régime présidentiel, et moi je suis hostile au régime présidentiel. » La question fut relancée au printemps de 2000 par une proposition de loi constitutionnelle émanant de Valéry Giscard d'Estaing, appuyée ensuite par le Premier ministre, Lionel Jospin. Risquant un désaveu politique à l'Assemblée de la part d'une partie de la droite qui aurait voté la proposition avec la gauche, Jacques Chirac jugea préférable de trouver un accord avec son Premier ministre ; il se rallia à un « quinquennat sec », c'est-à-dire un raccourcissement sans autre modification, par exemple la limitation du nombre des mandats. Un projet, signé par les deux têtes de l'exécutif, fut ainsi voté très largement par les deux Assemblées, puis soumis au référendum, selon le choix du président, en septembre 2000. Organisé dans un quasi-consensus politique mais sans qu'il y ait eu une véritable campagne électorale, le référendum enregistra le taux record d'abstention de 69,8 p. 100. Il fut approuvé par 73,2 p. 100 de suffrages exprimés, qui ne représentaient que 18,6 p. 100 des électeurs inscrits !

La réduction du mandat à cinq ans permettait[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite de science politique à Sciences Po Grenoble, chercheur au laboratoire Pacte (UMR 5194, CNRS/ université Grenoble Alpes/Sciences Po Grenoble)

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Médias

Jacques Chirac - crédits : Diana Walker/ Time Life Pictures/ Getty Images

Jacques Chirac

Édouard Balladur et Alain Juppé - crédits : Pool Bassignac/ Stevens/ Turpin/ Gamma-Rapho/ Getty Images

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