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CIRQUE

Le cirque de création

Jusque dans les années 1950, le cirque reste le divertissement populaire par excellence. Il est célébré au cinéma : en 1952, Cecil B. De Mille réalise Sous le plus grand chapiteau du monde ; en 1956, Carol Reed tourne Trapèze avec Burt Lancaster et Tony Curtis, à Paris, au cirque d'Hiver. Pourtant, des temps difficiles s'annoncent. Usé, incapable de se renouveler face aux mutations de la société, battu en brèche par la concurrence du cinéma ou de la télévision. Son esthétique est volontiers considérée comme obsolète, son économie comme frappée d'archaïsme. C'est particulièrement vrai en France, malgré les popularités toujours intactes d'un clown comme Achille, d'un acteur comme Jean Richard qui s'apprête à lancer, en 1969, son propre chapiteau, ou encore d'une émission de télévision comme « La Piste aux étoiles » d'Hélène et Gilles Margaritis, diffusée de 1963 à 1976. Victime d'un phénomène de désaffection, le cirque voit diminuer son public (10,8 p. 100 des Français en 1979, 9,7 p. 100 en 1981). La crise du pétrole, qui éclate dans les années 1970, renchérissant les coûts de transports alors que la seule règle est encore l'itinérance, semble devoir lui porter un coup fatal. Incapables d'échapper à la faillite, plusieurs chapiteaux nés dans l'entre-deux-guerres en font les frais, à commencer par le cirque Amar. Symbole des plus riches heures de la piste, le cirque Médrano, à Paris, est détruit en 1973 : passé dans les mains de la famille Bouglione (également propriétaire du cirque d'Hiver), il a été revendu à des promoteurs.

De là à annoncer la mort du cirque – comme on le fera, peu après, pour la fête foraine –, le pas est vite franchi. Or non seulement le cirque ne va pas mourir, mais il va retrouver sa santé, en même temps que son public : en 1992, 16 p. 100 des Français, soit 10 millions de personnes, toutes générations confondues, déclaraient y être allés au moins une fois dans l'année. Dix ans après, elles étaient 12 millions.

Une nouvelle esthétique de la piste

La raison de ce miracle ? Une véritable révolution culturelle, plus connue sous le nom de « nouveau cirque », appelé aussi – plus justement – « cirque de création ». Loin des numéros mille fois répétés, ce qui compte dans ce cirque d'un nouveau genre, sans Monsieur Loyal ni animaux dressés, c'est l'émotion produite par un spectacle conçu moins comme une simple succession de performances que comme un tout savamment mis en scène. Une esthétique neuve se dessine ici, nourrie aussi bien par le théâtre que par la sculpture, la peinture ou la danse... Alliant aux techniques propres aux arts de la piste (jonglerie, acrobatie, voltige...) celles des autres arts, elle multiplie les passerelles, appelle à la confrontation. Un soin jusqu'alors inconnu est apporté aux costumes, aux lumières, à la musique, le plus souvent résolument contemporaine (jazz, rock...) et jouée en direct. Chaque élément devient en lui-même essentiel. Il n'est plus uniquement au service de la prouesse – toujours présente –, mais trouve sa place dans la logique du spectacle tout entier dont l'architecture, reposant sur un thème, une référence, une scénographie, voire un espace singulier, se révèle souvent complexe. Dans le foisonnement des genres et des styles, toutes les audaces semblent permises.

Dès la fin des années 1970 et le début des années 1980, on assiste à une effervescence de propositions. En 1979, Bartabas fonde le cirque Aligre puis, en 1984, le théâtre Zingaro, « cabaret équestre ». Remplaçant les chevaux par des motos, certains, tel Archaos, rompent avec le rond de la piste traditionnelle. D'autres, comme le cirque du Docteur Paradi de Jean-Christophe Hervet et Régine Hamelin, délaissent le chapiteau et pratiquent le trapèze[...]

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Le Général Tom Pouce, en 1866 - crédits : MPI/ Archive Photos/ Getty Images

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