CHAMPS D'URNES CIVILISATION DES
Définie par l'école archéologique allemande, la civilisation dite des « champs d'urnes » se caractérise par l'usage de la crémation et le dépôt des cendres du défunt dans des urnes rassemblées en de grandes nécropoles (d'où leur nom). Ce rite funéraire apparaît en Europe centrale à la fin de l'Âge du bronze moyen (soit au ~ xiiie s.), se répand ensuite dans une partie de l'Europe occidentale et de l'Europe du Sud-Est au Bronze final I, ou Champs d'urnes I (~ 1250-~ 1100), pour s'imposer pendant une très longue période au Bronze final II et III, ou Champs d'urnes II et III (~ 1100-~ 750). Pour l'école allemande, la transformation des habitudes funéraires correspond à un changement de civilisation, et l'expansion de ces nouvelles habitudes ne peut qu'accompagner de grands mouvements de peuples. Cette théorie n'était pas, avant la Seconde Guerre mondiale, absente de préoccupations politiques. Si aujourd'hui la théorie « expansionniste » est très en recul, le débat entre des chercheurs qui croient à la civilisation des champs d'urnes et ceux qui refusent cette notion reste ouvert.
Pour les premiers, il existe une acculturation progressive, fondée sur une pratique funéraire complètement nouvelle, et un répertoire du matériel archéologique (céramiques, objets de parure, outils, armes) tout à fait homogène ; il s'agit en particulier d'urnes cannelées, à col cylindrique, d'épingles à collerettes et à grosse tête globuleuse, de haches à ailerons médians et d'épées à soie triangulaire et à rivets, avec, à la dernière période, apparition de grandes assiettes ou plats à décor incisé, de bracelets larges, d'épées de types variés et de fibules. Cette acculturation se fait dans toute la France de l'Est et dans une partie de la France du Sud-Ouest et de l'Espagne à partir des régions rhénanes, tandis que l'Italie a reçu l'influence de l'Allemagne du Sud. La raison de l'apparition d'une telle civilisation serait à chercher dans une période de troubles (fin du Bronze final I et du Bronze final II) qui aurait engendré des transformations de la société (donc des pratiques funéraires), tandis que le Bronze final III serait une période de stabilité, permettant, par ailleurs, une diffusion lente et harmonieuse du fer.
Pour les seconds, il s'agit davantage de nouvelles habitudes funéraires que d'une nouvelle civilisation. Ils se fondent sur le fait que l'incinération est connue dès avant le Bronze final ; que ce rite apparaît dans des nécropoles qui montrent une continuité de l'occupation humaine, sans preuve de bouleversements particuliers ; que le fait qu'on trouve des objets appartenant à un même répertoire dans une partie de l'Europe n'est pas non plus particulier au Bronze final ; que, d'ailleurs, certains objets de ce répertoire sont trouvés dans des sépultures à inhumation ; qu'enfin les différences régionales sont très grandes. Pour eux, l'influence des pays d'Europe centrale n'est pas contestable : elle se limite à certains phénomènes qui ne sont pas le reflet d'un bouleversement généralisé mais d'une mode comme en ont connu d'autres sociétés ; la pratique de l'incinération relève alors du domaine psychique, intellectuel et religieux.
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Écrit par
- Alain DUVAL : conservateur en chef du musée des Antiquités nationales, Saint Germain en Laye
Classification
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