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HELLÉNISTIQUE CIVILISATION

Une civilisation urbaine conçue pour des expatriés

À l'exception des vieilles monarchies continentales (Épire et Macédoine), tous ces rois s'appuyaient sur une minorité d'expatriés, venus de Macédoine et de Grèce. Or la révolte, en – 323, des mercenaires installés par Alexandre dans les régions les plus orientales de son empire, avait démontré qu'il n'y avait pas de colonisation possible si l'on ne reconstituait pas, dans les territoires conquis, le cadre de vie des Grecs. C'est pourquoi les successeurs d'Alexandre fondèrent partout des villes (plus de 300) qui, tout en transmettant à la postérité leur nom ou celui de leurs proches (c'était déjà le cas en Macédoine de Philippes, de Thessalonique et de Démétrias, ou de Lysimachéia en Thrace), devaient aussi permettre aux colons de retrouver le cadre civique auxquels ils étaient accoutumés. L'Asie fut ainsi parsemée de Séleucies, d'Antioches, d'Apamées, et les Attalides firent de même dans le royaume de Pergame ; l'Égypte, moins urbanisée, eut néanmoins sa Ptolémaïs, sa Bérénice, son Arsinoé. Avec Nicomédie et Pruse, les rois de Bithynie, barbares hellénisés, s'inscrivirent à leur tour dans cette tradition, en attendant Mithridate Eupator et Hérode le Grand. Moins officielles peut-être, d'autres fondations, principalement en Syrie, reçurent des noms rappelant la Macédoine, comme Béroia. Naturellement, il fallut s'adapter : à Nippur (Babylonie) des chapiteaux grecs couronnèrent des colonnes de brique ; à Aï Khanoum (Bactriane) on modela des statues de terre crue stuquée. Néanmoins le voyageur grec ou le colon retrouvait partout les édifices et les institutions caractéristiques des anciennes cités, tandis qu'une langue commune (la koinè) se substituait dans la vie quotidienne aux anciens dialectes (dont le macédonien...). Dans un environnement « barbare », l'Hellène, quelle que fût sa terre d'origine, avait ainsi le moyen d'entretenir sa spécificité, puisqu'il était seul à jouir du théâtre, où des professionnels itinérants (les technites de Dionysos, très considérés) jouaient le répertoire dramatique et lyrique grec, et surtout du gymnase, dont la fréquentation conférait la citoyenneté et par conséquent l'accès aux magistratures locales. Ainsi se formèrent des communautés sans doute hétérogènes, mais soudées par une forte solidarité ethnique et culturelle. C'est en effet l'époque où se fixèrent les étapes de l'éducation libérale (paideia) : d'abord l'école du grammairien, où l'enfant apprenait les bons usages (et en premier celui de la langue acquis au contact des auteurs classiques), puis celle du rhéteur, où il se formait à l'éloquence par l'étude des maîtres du genre. Certes, une minorité de jeunes gens aisés achevait seule le cursus. Mais les connaissances élémentaires étaient largement répandues, y compris parmi les femmes.

Une civilisation où l'activité intellectuelle reste intense

Le rayonnement intellectuel n'était pas limité aux capitales royales. Athènes abrite les écoles philosophiques où enseignent les héritiers de Platon (Académie), d'Aristote (Lycée), mais aussi d'Antisthène et de Diogène (cyniques). Des sectes nouvelles apparaissent aussi : stoïciens (Portique), épicuriens (Jardin), pyrrhoniens. Certains philosophes y faisaient toute leur carrière. D'autres emportaient fort loin leur savoir : Cléarque de Soloi apporta à Aï Khanoum une copie des maximes delphiques, et, à la fin de la période hellénistique, la Campanie attira de nombreux philosophes, en particulier épicuriens. Rhodes, surtout célèbre par ses écoles de rhétorique, accueillit également le philosophe Posidonios d'Apamée. À l'époque de Ptolémée Philadelphe, la petite île de Cos abrita un cénacle[...]

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  • : correspondant de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), professeur de langue et littérature grecques à l'université de Nancy-II

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