VOISIN CLAIRE (1962- )
Née en 1962, Claire Voisin est une mathématicienne française, ancienne élève de l'École normale supérieure. Après avoir passé l'agrégation, elle prépare une thèse à l'université Paris-Sud, sous la direction d'Arnaud Beauville. À la suite de sa soutenance, en 1986, elle est immédiatement recrutée au CNRS, où elle travaillera une trentaine d'années, d'abord à Orsay puis à l'Institut de mathématiques de Jussieu. Elle est nommée professeure au Collège de France en 2016. Elle a reçu les médailles de bronze (1988) et d'argent (2006) du CNRS, ainsi que de prestigieux prix nationaux (prix Servant et Sophie Germain de l'Académie des sciences...) et internationaux (prix de la Société mathématique européenne, Clay Research Award, prix Heinz Hopf...). Elle est membre de l'Académie des sciences (2010) ainsi que de nombreuses académies étrangères. En 2016, elle reçoit la médaille d’or du CNRS.
Le domaine de recherche de Claire Voisin est la géométrie algébrique, c'est-à-dire l'étude des figures géométriques définies par des équations algébriques. On peut considérer que ce sujet est né avec Descartes et Pascal, qui ont tous deux observé qu'un point du plan (espace à deux dimensions) peut se repérer par deux coordonnées (x,y), et que ceux de ces points qui vérifient une équation algébrique dessinent une courbe : par exemple, les points tels que x2 + y2 = 1 forment un cercle. Le sujet s'est développé considérablement au xixe siècle, avec l'introduction des espaces de dimension plus grande, des nombres complexes et de la géométrie projective. Il a connu une véritable révolution à partir de 1950, avec l'arrivée de nouvelles méthodes extrêmement puissantes (théorie des faisceaux, cohomologie…), développées d'abord par Jean-Pierre Serre (médaille Fields 1954), puis surtout Alexandre Grothendieck (médaille Fields 1966).
Alors que l'école française, à la suite de Grothendieck, a plutôt utilisé ces techniques pour aborder des questions issues de la théorie des nombres – la « géométrie arithmétique » –, les travaux de Claire Voisin les appliquent à des problèmes de géométrie plus classique. Son sujet de prédilection est la théorie de Hodge. Depuis Poincaré, on sait associer à une figure géométrique un objet algébrique simple, l’algèbre de cohomologie. Celle-ci ne dépend que de la topologie de la figure : c’est-à-dire qu’elle ne change pas si on la déforme légèrement. Pour les cas où cette figure est une variété algébrique,c’est-à-dire définie par des équations algébriques, le mathématicien écossais William Hodge met en évidence (vers 1940) une structure supplémentaire sur l’algèbre de cohomologie – appelée maintenant structure de Hodge – et qui, elle, dépend étroitement des équations de départ. Plusieurs des premiers travaux de Claire Voisin établissent le fait remarquable que, à partir de cette donnée assez simple d’algèbre linéaire, on peut dans certains cas reconstituer les équations de la figure.
Les structures de Hodge peuvent être définies sur des figures nettement plus générales que celles définies par des équations algébriques, les variétés kählériennes. Kunihiko Kodaira (médaille Fields 1954) avait suggéré que ces objets peuvent toujours être obtenus en déformant des variétés algébriques. Claire Voisin a montré que ce n’est pas le cas, en construisant des variétés kählériennes dont l’algèbre de cohomologie n’est pas celle d’une variété algébrique.
Hodge lui-même avait utilisé les structures de Hodge pour étudier les variétés algébriques contenues dans une variété donnée X – par exemple les droites contenues dans une surface. On sait associer à une telle « sous-variété » un élément de l’algèbre de cohomologie de X ; la conjecture de[...]
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Écrit par
- Arnaud BEAUVILLE : professeur émérite
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Média