CLAN
Dans son acception minimale, qui est aussi celle du langage courant, le terme « clan » désigne un groupement fondé sur la parenté : ses membres se reconnaissent descendants d'un même ancêtre. Cette signification fondamentale du clan en fait l'institution qui, par excellence, incarne et illustre un des principes de base de l' organisation de la vie en société : la consanguinité. Le lien de sang, opposé au lien de territoire, paraît si important aux sociologues évolutionnistes du xixe siècle que certains d'entre eux – sir Henry Maine dans son Ancient Law (1861) et Lewis H. Morgan dans son Ancient Society (1877) – en font un des traits distinctifs essentiels des organisations sociales dites, à cette époque, « primitives » ou « barbares ». Si ces ambitieuses généralisations ne sont plus acceptées par les anthropologues sociaux d'aujourd'hui, ces derniers s'accordent à souligner le rôle capital de la parenté dans les sociétés non industrielles et, particulièrement, non lettrées.
En tant que concept descriptif et analytique des disciplines anthropologiques, clan est entendu en des acceptions plus particulières. On le distingue de termes se référant à d'autres groupements fondés eux aussi sur la consanguinité ou l'alliance : lignage, sib, phratrie, moitié, gens, famille étendue, tribu, etc. Malheureusement, ces acceptions plus riches et plus précises de clan, et des concepts qui lui sont apparentés, varient d'une décennie à la suivante, d'une école à une autre, et même quelquefois d'un chercheur à un très proche collègue.
Descendance unilinéaire
Dans les langues gaéliques, la consonne latine p se transforme en k ; c'est ainsi que le mot latin planta donna naissance à clann, d'où procède notre clan. Cette étymologie indique très clairement en quel sens les premiers utilisateurs du mot clan le comprenaient : les rejetons, les bourgeons ; ainsi se désignaient les membres des clans écossais et irlandais.
La descendance qu'ils visaient ainsi n'était pas la descendance biologique. Biologiquement, chaque individu est le descendant d'un nombre considérable d'hommes et de femmes, puisque, partant de lui et remontant dans le temps, à chaque génération, le nombre de ses ascendants double (un père et une mère, quatre grands-parents, huit arrière-grands-parents, et ainsi de suite). Si on se reconnaissait un lien de parenté avec tous les descendants biologiques de ses propres ascendants biologiques, disons de la huitième génération – ils sont deux cent cinquante-six –, on trouverait bien difficilement dans sa propre société un contemporain non parent. Le lien de parenté n'aurait plus aucune signification comme principe de distinction à l'intérieur d'une société globale.
La descendance est toujours comptée unilinéairement. Parmi la multitude de parents biologiques, chaque société choisit de ne considérer comme parents que ceux qui appartiennent soit à la ligne maternelle, soit à la ligne paternelle (il y a d'autres arrangements, mais ils ne sont que des variantes). Ainsi un seul individu de chaque génération est-il considéré comme ancêtre. Dans un système matrilinéaire, les parents d'une personne quelconque (homme ou femme), qu'on nommera ici Ego sont toutes ses ascendantes (sa mère, sa grand-mère, son arrière grand-mère, etc.) et tous ses collatéraux (hommes et femmes) qui descendent eux-mêmes, en ligne féminine, d'une de ses ascendantes. Un système patrilinéaire se décrit d'une manière analogue dans la ligne masculine.
On se rend compte que la restriction qu'apporte à la parenté biologique le principe unilinéaire deviendrait illusoire si l'ancêtre commun reculait, de génération en génération, ad infinitum. Sa proximité réduit la parenté de Ego. En fonction de cette variable (la distance[...]
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Écrit par
- Jacques MAQUET : professeur à l'université de Californie à Los Angeles
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