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HASKIL CLARA (1895-1960)

Mozart comme une grâce

Avec le retour de la paix son talent commence enfin à être reconnu : premier enregistrement commercial, pour Decca, en 1947 (Quatrième Concerto pour piano de Beethoven avec l'Orchestre philharmonique de Londres sous la baguette de Carlo Zecchi), succès de ses concerts aux Pays-Bas (1949). Pablo Casals l'invite en 1950 à son premier festival de Prades. La même année, elle joue à Salzbourg sous la baguette d'Herbert von Karajan (en 1956, à l'occasion du bicentenaire de la naissance de Mozart, il invitera Clara Haskil à une tournée de concerts dans les grandes capitales européennes). Paris rend enfin les armes lors d'un concert triomphal de 1951. Les plus grands chefs – Pierre Monteux, Charles Münch, Rafael Kubelík, Carl Schuricht, Carlo Maria Giulini, Igor Markevitch, Ferenc Fricsay, Ernest Ansermet, Otto Klemperer – se l'arrachent. Elle fonde avec le violoniste Arthur Grumiaux l'un des plus fameux duos de l'époque et enregistre une intégrale des sonates pour violon et piano de Beethoven qui fait encore référence.

En dehors de Debussy et Ravel et de quelques pages signées Béla Bartók, Henri Sauguet et Paul Hindemith – elle a joué le Thème et variations sur les Quatre Tempéraments pour piano et orchestre sous la direction du compositeur –, Clara Haskil s'est peu intéressée à la musique du xxe siècle. Elle a néanmoins créé le Concerto pour deux pianos et orchestre de Claude Arrieu (1938, avec Émile Passani) et, la même année, la Symphonie concertante pour deux pianos et cordes de Dinu Lipatti, l'auteur tenant la partie du second piano. Ce dernier lui dédie son Nocturne opus 6 (1939). Elle meurt à Bruxelles le 7 décembre 1960, des suites d'une chute dans les escaliers de la gare du Midi. En hommage à cette artiste exceptionnelle, un concours international de piano qui porte son nom est créé à Montreux-Vevey en 1963.

Schumann, Variations Abegg - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Schumann, Variations Abegg

À ses débuts, Clara Haskil parcourait un très vaste répertoire, exigeant toutes les ressources de la virtuosité la plus accomplie : Albéniz, Weber, Liszt, Rachmaninov. Au fil des années, son univers musical s'est recentré autour de Haydn, Beethoven, Schubert – qu'elle fut l'une des premières, après Artur Schnabel, à défendre avec cette passion –, Chopin, Schumann et, surtout, Mozart, dont elle était l'interprète élue.

Schumann, Concerto pour piano - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Schumann, Concerto pour piano

Mozart, Concerto pour piano n<sup>o</sup>9 «Jeunehomme» - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Mozart, Concerto pour piano no9 «Jeunehomme»

Mozart, Concerto pour piano n<sup>o</sup>23 - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Mozart, Concerto pour piano no23

Celle qui fut si peu, si tardivement et parfois si mal enregistrée nous laisse des interprétations d'une lumineuse évidence qui fascinent encore aujourd'hui. Celles-ci sont à rechercher moins dans sa discographie officielle (elle regrettait que son contrat d'exclusivité avec Philips l'empêche d'enregistrer avec les musiciens qu'elle aimait, tel Rafael Kubelík) que dans les enregistrements pris sur le vif. De nombreuses bandes de radio nous laissent heureusement le témoignage de sa collaboration avec Charles Münch ou Otto Klemperer et des récitals qu'elle donna aux festivals de Salzbourg et d'Édimbourg, au casino d'Hilversum ou au château de Ludwigsburg. Elle y parvient comme nul autre à la maîtrise absolue des contraires : engagement passionné et pudeur des sentiments, pureté de la ligne mélodique et splendeur des couleurs sonores, émotion et sobriété. Comme s'il fallait les malheurs de toute une vie pour que chante enfin Mozart.

— Pierre BRETON

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Écrit par

  • : musicographe
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Schumann, Variations Abegg - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Schumann, Variations Abegg

Schumann, Concerto pour piano - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Schumann, Concerto pour piano

Mozart, Concerto pour piano n<sup>o</sup>9 «Jeunehomme» - crédits : CEFIDOM / Encyclopædia Universalis France

Mozart, Concerto pour piano no9 «Jeunehomme»