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CLASSES D'ÂGE, anthropologie

Les systèmes de classes d'âge

Le problème, cependant, reste entier de savoir à quoi tient, passé un certain âge, la persistance, en certaines sociétés seulement, des classes d'âge. Les informations dont Eisenstadt disposait ne lui ont pas permis de distinguer clairement entre les deux grands types possibles de systèmes de classes d'âge, les systèmes linéaires, d'une part, les systèmes cycliques, d'autre part. Dans chacun de ces types, qui sont tous deux présents en Afrique orientale comme en Afrique de l'Ouest, toute promotion, formée à partir de l'adolescence, suit, au cours de son histoire, un parcours unique qui lui fait franchir des échelons successifs. Mais en régime cyclique, le nom qu'elle reçoit à son baptême suivra l'individu jusqu'au bout : ainsi, chez les Souk du Kenya, un homme de la promotion « Cuivre » sera toute sa vie désigné comme un « Cuivre ». En régime linéaire, les classes successives demeurent très souvent anonymes et ne se distinguent que par le degré qu'elles ont atteint dans l'échelle des grades, si bien que la promotion changera plusieurs fois de nom au cours de son existence, pour s'éteindre définitivement avec le dernier de ses membres. Dans le système cyclique, le nom de la promotion ne disparaît au sommet que pour renaître à la base de l'échelle. Toutefois, la différence essentielle entre les deux régimes tient au mode de recrutement. En régime linéaire, une classe réunit simplement tous les jeunes gens dont on estime qu'ils sont en mesure de subir l'initiation ; sa composition repose donc sur l'âge physique de ses membres. En système cyclique, une promotion groupera non pas les hommes nés approximativement entre telle et telle année, mais les fils des membres de telle promotion antérieure. Chez les Souk, par exemple, les « Cuivre » se définissent comme les fils des « Laiton », les « Roc » comme ceux des « Zèbres ». Dans les deux régimes, l'institution renforce en l'exaltant la cohésion du groupe local. Mais un autre souci transparaît dans le système cyclique où, la classe du fils étant fixée d'après celle du père, la répartition entre les classes viendra toujours soit souligner, soit, au contraire, effacer la solidarité entre père et fils selon le nombre des classes en présence. Chez les lagunaires de Côte-d'Ivoire, pour lesquels la filiation se détermine d'après la ligne maternelle, la présence de quatre classes rapproche les pères des fils : les A sont les pères des C, les B sont les pères des D. Le mode de recrutement et la dialectique des rapports ainsi engendrés entre classes insufflent aux systèmes cycliques leur caractère dynamique. Il n'y a pas de contradiction entre l'ascension d'une classe (qui monte d'un échelon à chaque nouvelle initiation) et la permanence du cadre à l'intérieur duquel s'effectue cette ascension ; mais toute promotion, en exerçant les fonctions assignées à l'échelon qu'elle occupe, s'efforce d'atteindre le degré supérieur où se situe la moitié rivale. L'antagonisme entre classes voisines est ainsi le ressort des systèmes cycliques, tandis que l'émulation est beaucoup moins sensible dans les systèmes de type linéaire.

On s'explique mieux, à partir de ces différences structurelles, que ne subsiste qu'en certains cas seulement la classe dans l'âge mûr : en effet, passé un certain âge, l'institution ne garde d'importance véritable que dans les systèmes de type cyclique. En régime linéaire, son rôle principal, qui est d'assurer la cohésion du groupe social, se trouve alors accompli ; les aînés, de toute façon, recueilleront le pouvoir en vertu de leur statut familial, qu'ils soient chefs de lignage ou simples chefs de ménage. Il en va autrement dans le[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

Classification

Média

Guerrier Massaï - crédits : P. Almasy/ AKG-images

Guerrier Massaï

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