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ARRIEU CLAUDE (1903-1990)

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Née à Paris le 30 novembre 1903, morte à Paris le 7 mars 1990, la compositrice française Claude Arrieu occupe, par sa personnalité et par l'originalité de son style, une place importante dans l'évolution de la musique contemporaine.

Entrée en 1924 au Conservatoire national de musique de Paris, elle y travaille dans les classes de Georges Caussade, Roger-Ducasse, Noël Gallon, Marguerite Long et Paul Dukas et remporte en 1932 un premier prix de composition. Elle va dès lors développer un style personnel sans se soucier des modes et sans jamais se cantonner dans quelque académisme que ce soit. Elle s'intéresse cependant à toutes les conquêtes de son époque et particulièrement à l'évolution du langage musical et des différents moyens techniques désormais offerts. Elle intègre en 1935 le Service des programmes de la Radiodiffusion française, où elle sera metteur en ondes (1938) puis chef adjoint du service des illustrations musicales (1945-1947). Elle va participer à l'aventure de la musique concrète, en collaborant notamment à la série radiophonique expérimentale de Pierre Schaeffer La Coquille à planètes (1943-1944). En 1949, elle reçoit le prix Italia de la R.A.I. pour Frédéric général.

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Claude Arrieu écrit pour toutes les formations, compose des œuvres de « musique pure » et d'autres appropriées au théâtre, au cinéma, à la radio, voire au music-hall, ajoutant à ses dons habituels le sens dramatique ou comique ainsi que le goût du rythme et des images.

Elle compose notamment six concertos – pour piano (1932), pour deux pianos (1934), pour violon (1938 et 1949), pour flûte (1946), pour trompette et cordes (1967) –, dans lesquels elle manifeste le souci constant de mettre en valeur l'instrument soliste, faisant preuve d'une parfaite maîtrise technique d'écriture et de construction. Loin de se laisser contraindre par les règles formelles, la compositrice se plie à leurs exigences comme si la rigueur du cadre qu'elles déterminent, plutôt que d'étouffer sa veine naturelle, lui en rendait l'expression plus aisée.

Parmi les pièces de musique de chambre les plus importantes, signalons son Trio d'anches (1936), sa Sonatine pourdeux violons (1937), son Quatuor pour clarinettes (1964) ou encore sa Sonatine pour flûte et piano, qui fait une grande impression lors de sa première audition à la radio en 1944 par Jean-Pierre Rampal et H. Moyens.

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Si Claude Arrieu a laissé des œuvres instrumentales importantes, c'est cependant la musique vocale qui a marqué sa carrière : la voix l'a beaucoup inspirée, et elle a mis en musique des poèmes de Joachim du Bellay, Louise de Vilmorin, Louis Aragon, Jean Cocteau, Jean Tardieu, Paul Eluard...

En 1953, Cadet Roussel, écrit en 1938 et 1939, est créé à l'Opéra de Marseille. Il s'agit de son premier opéra bouffe, sur un livret d'André de la Tourrasse et de Jean Limozin. La verve comique et spontanée de Claude Arrieu se donne libre cours dans cette joyeuse aventure et la spontanéité et la fraîcheur dont la musicienne fait preuve a fait dire à un critique qu'elle était l'héritière directe d'Emmanuel Chabrier. En 1960, La Princesse de Babylone est désignée comme le meilleur spectacle de la décentralisation lyrique. Claude Arrieu a su préserver en trois actes d'une demi-heure chacun la concision de l'œuvre de Voltaire (adaptée par Pierre Dominique), qui faisait faire à ses personnages le tour du monde en trois pages. Par ailleurs, elle fait preuve d'un grand savoir-faire en écrivant, sur un sujet bouffe, une musique bouffe mais qui n'est en aucune façon de la musique légère. S'exprimant dans un langage musical moderne, elle prouve avec cette œuvre que modernité et chant mélodique ne sont pas incompatibles.

Claude Arrieu a écrit de nombreuses mélodies, notamment les Chansons bas, pour chant et piano, d'après les poèmes de Mallarmé, créées en 1937, Candide, musique radiophonique sur des textes de Jean Tardieu d'après Voltaire. D'une manière générale, Claude Arrieu cède rarement à une inspiration de circonstance. À la Libération cependant, l'émotion et le réconfort transparaissent dans sa Cantate des sept poèmes d'amour en guerre, pour soprano, baryton et orchestre, d'après des poèmes de Paul Eluard. Cette œuvre, très classique de structure, est d'une grande sobriété dans son instrumentation et cette simplicité en accuse peut-être encore plus la pureté dramatique. Les sept poèmes sont confiés tantôt à la soprano, tantôt au baryton, qui s'unissent dans le sixième. L'œuvre est encadrée par un prologue et un épilogue qui sont réunis par leur thème commun.

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Par les formes choisies (concertos, quatuors, sonates...), on peut penser que Claude Arrieu a écrit une musique d'un temps révolu et qui n'a pas tenu compte de la révolution qui s'est opérée au début du xxe siècle avec la seconde école de Vienne, mais, comme l'a écrit Pierre Schaeffer : « Claude Arrieu est bien de son époque par une vertu de présence, un instinct d'efficacité, une audacieuse fidélité. Qu'importe les moyens, concertos ou chansons, les publics, l'élite des concerts ou la foule des spectateurs, pourvu que l'émotion au travers d'une technique impeccable et dans une spirituelle vigilance, trouve le chemin du cœur. »

— Juliette GARRIGUES

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

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