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BOUCHINET-SERREULLES CLAUDE (1912-2000)

Claude Bouchinet-Serreulles, fils d'industriel, né le 26 janvier 1912 à Paris, licencié en droit et diplômé de l'École libre des sciences politiques, avait observé les méfaits du nazisme en 1937-1938 lorsqu'il avait été attaché du conseiller commercial à Berlin. Officier d'ordonnance du général de Gaulle à partir du 26 juillet 1940, son « ami et compagnon de toutes les heures » et un de ses truchements dans les rapports franco-britanniques, il avait considéré l'entrée dans le combat sur le sol national comme un devoir impérieux et, dès la fin de 1942, il s'y était préparé au Bureau central de renseignements et d'action (B.C.R.A.). « Vous avez bien servi, vous servez bien, vous servirez bien et je vous aime bien » ; ces mots de Charles de Gaulle, écrits à Claude Serreulles le 15 mai 1943, l'encouragèrent quand il quitta le relatif confort anglais pour aider Jean Moulin dans les batailles de la clandestinité. Arrivé en France occupée le 16 juin 1943, il assuma les conséquences des arrestations du 21 juin à Caluire. La disparition de Jean Moulin, président du Conseil national de la Résistance, aggravait les conséquences de la déportation du général Delestraint, chef de l'Armée secrète. Délégué général par intérim du Comité français de Libération nationale (C.F.L.N.), Serreulles forma avec Jacques Bingen, qui le rejoignit dès août, un duo d'action gaulliste et lucide. Si le colonel Passy, chef du B.C.R.A., les accusa d'imprudences pour favoriser la mise en place du préfet radical Émile Bollaert comme délégué général du C.F.L.N., la déportation de ce dernier et la mort de son mentor socialiste Pierre Brossolette, rendirent fondamental le travail du tandem Sophie-Cléante (Serreulles-Bingen) pour la préparation de la prise du pouvoir d'État par des hommes politiquement sûrs, mais en symbiose avec la résistance intérieure.

Après une ultime mission à Londres au printemps de 1944, Claude Bouchinet-Serreulles fut nommé commissaire de la République ; à la demande d'Alexandre Parodi, ministre clandestin du Gouvernement provisoire de la République française, il partit de Lyon à vélo pour contrôler l'installation des nouvelles autorités. Son rapport de septembre 1944, partiellement repris dans les Mémoires de guerre du général de Gaulle, est l'une des meilleures descriptions des réalités de la France libérée ; il y écrivait notamment : « Dans l'ensemble, la Libération s'est effectuée de façon heureuse. Les troubles graves que certains redoutaient, au lieu d'être la règle, ont été l'exception. Très rares ont été les effusions de sang. [...] D'instinct, les masses populaires font confiance au gouvernement du général de Gaulle. [...] Dans cette conjoncture, il apparaît que le Gouvernement, malgré la faiblesse de ses moyens, peut tout. L'attente est immense. Jamais autorité sur le seul nom de son détenteur et, quant au reste, inconnue, n'a joui d'un plus ample crédit. »

Directeur du cabinet du ministre de l'Intérieur Adrien Tixier en 1944-1945, Claude Bouchinet-Serreulles fut l'enquêteur des missions délicates, notamment après des mises à sac de prisons et des exécutions de condamnés à mort graciés ; il décrivit les autorités « grignotant de façon efficace les adversaires de l'ordre ». Chef de service au ministère des Affaires étrangères jusqu'en 1948, il fut directeur à l'Organisation européenne de coopération économique jusqu'en 1951. Président et administrateur de sociétés, directeur général du Parisien libéré de 1978 à 1982, ce gaulliste de gauche a été membre du conseil de l'Ordre de la Libération et de l'institut de Gaulle jusqu'à sa mort, survenue le 8 décembre 2000, deux mois après la publication chez Grasset de ses souvenirs de[...]

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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