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OLLIER CLAUDE (1922-2014)

Après des études secondaires au lycée Carnot, Claude Ollier, né le 17 décembre 1922 à Paris, entre à l'École des hautes études commerciales et passe une licence en droit. Il exerce ensuite de nombreux métiers. Simultanément, il écrit de petits textes, récits de rêves, carnets, qu'il ne songe pas encore à publier. C'est seulement en 1955 qu'il décide de se consacrer entièrement à l'écriture.

Souvent rapprochée du Nouveau Roman, son œuvre inclassable, qui a trait aussi bien au roman policier, à la science-fiction, qu'au récit d'aventures, semble être méticuleusement construite à partir de quelques thèmes précis : la topographie et tous les jeux de pistes, d'itinéraires, de circulation — et de circularité — qui s'y rapportent ; l'identité et, conjointement, les doubles, les personnages ambigus, les noms anagrammatiques ; l'Islam (où Claude Ollier a longtemps séjourné) ; l'image (films, photographies, cartes postales abondent dans ses romans) et l'imaginaire. Autour de ces thèmes une histoire va s'organiser, pour chaque livre différente mais toujours volontairement simple et d'une facture narrative classique. Un personnage facilement identifiable socialement évolue dans un contexte économique, historique et culturel également défini avec précision. Mais à cette intrigue simple se superpose, très vite, une fiction complexe, sorte de filet, ou plutôt de tamis, qui place le lecteur à distance, et trouble le récit. De cette stratification du texte naissent des symétries : multiplication de circuits à deux entrées, personnages dédoublés, scènes répétées, coïncidences ; tout cela conduisant le lecteur à reconstruire le livre, dans un espace-temps qu'il doit repréciser à partir des rares indications, quelquefois déroutantes — au sens littéral du mot —, que l'auteur veut bien lui transmettre. Un jeu s'organise alors, dont les règles fixées par l'histoire elle-même, et dont l'enjeu serait, pour l'auteur comme pour le lecteur, la découverte de la vérité. Cet aspect ludique de l'œuvre de Claude Ollier s'accentue dans des livres tels que MarrakchMedine, 1980, et Une histoire illisible, 1986, où l'auteur abandonne la recherche de la vérité au lecteur en se contentant de décrire des réalités contradictoires qui sont autant d'embûches semées sur son chemin — chemin en parfaite symétrie, encore une fois, avec celui de l'écrivain qui suit aveuglément son imaginaire et sa mémoire.

Claude Ollier définit ses trois premiers livres ainsi : « La Mise en scène (1958) est un roman d'aventures coloniales, Le Maintien de l'ordre (1961) est un roman politico-policier, Été indien (1963) un roman d'amour en bandes dessinées. » Il ajoute : « Ces fictions sont construites autour d'un centre perceptif itinérant qui, s'il n'est plus le personnage romanesque classique, peut encore être rattaché à la notion même de personnage. Ce pseudo-personnage, dans l'espace où il est plongé, se trouve dans le même rapport que l'écrivain face au langage, et que le lecteur futur face à la fiction. » Ces trois livres font partie d'une suite fictionnelle intitulée Le Jeu d'enfant qui comprend cinq autres livres : L'Échec de Nolan (1967), La Vie sur Epsilon (1972), Enigma (1973), Our ou Vingt Ans après (1974), Fuzzy sets (1975), eux-mêmes écrits à partir des trois premiers. À lire ces analyses théorisantes de l'écrivain, on pourrait penser que son œuvre est froidement rigoureuse et « technique ». Ce serait le cas si la passion de Claude Ollier pour l'Islam, qui joue puissamment comme source d'inspiration de ses récits, n'avait instillé des émotions charnelles et des impressions qui débordent le cadre d'une construction intellectuelle. « L'Islam, confie Claude Ollier, c'est une culture[...]

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