COBRA, mouvement artistique
Publications et expositions
Parallèlement à leurs recherches, les cobras participent à des expositions et entretiennent des activités éditoriales plus ou moins confidentielles. À l'instar des ouvrages publiés par les éditions Cobra en Belgique ou des monographies d'artistes réalisées par les Danois sous l'égide de Jorn, la revue Cobra, organe officiel du mouvement (complétée par Petit Cobra et Tout petit Cobra, bulletins plutôt destinés à un usage interne), connaîtra une diffusion limitée– les tirages ne dépasseront pas 500 exemplaires. Confiée tour à tour à différentes équipes rédactionnelles, la revue témoigne du parti pris décentralisateur qui prévalait au sein du mouvement. Son contenu est lui aussi très diversifié : textes théoriques ou polémiques, articles sur l'art populaire, photographies, bande dessinée, mais aussi l'amorce d'un Atlas psychologique universel.
Quatre numéros paraissent en 1949 : le premier en mars, à Copenhague, immédiatement suivi du deuxième, publié à Bruxelles à l'occasion de la première exposition du groupe, La Fin et les moyens. Le numéro 3, consacré au cinéma expérimental, est publié en août à l'issue du festival du film expérimental et poétique de Knokke-le-Zoute. Simultanément, l'exposition L'Objet à travers les âges est présentée à Bruxelles. Conçue comme un parcours expérimental, elle invite les visiteurs à mettre en situation les objets qui leur sont confiés à l'entrée. Le numéro 4 de la revue, conçu par Constant, paraît en novembre, au moment où se tient l'Exposition internationale d'art expérimental au Stedelijk Museum d'Amsterdam. Outre l'accrochage réalisé par l'architecte Aldo van Eyck, les accents révolutionnaires du discours prononcé par Dotremont y provoquent un scandale.
Trois numéros de Cobra voient le jour en 1950, dont l'un réalisé à Hanovre par Karl-Otto Götz et le groupe Meta. En 1951, la parution du numéro 8-9, préparé à Copenhague, est compromise par la dislocation progressive du groupe danois. Il restera donc à l'état d'épreuves. La dissolution du mouvement est précipitée l'été suivant par les hospitalisations de Jorn et Dotremont, tous deux atteints de tuberculose. Un ultime numéro financé par des mécènes, paraîtra néanmoins en octobre, à la faveur de la deuxième Exposition internationale d'art expérimental, organisée au palais des Beaux-Arts de Liège par Aldo van Eyck.
Malgré sa brièveté, l'aventure collective menée au sein du mouvement Cobra trouvera des prolongements significatifs dans les créations ultérieures de ses fondateurs – Appel, Constant et Jorn, ainsi qu'Alechinsky, sont aujourd'hui considérés comme des peintres majeurs –, mais aussi dans les travaux plus confidentiels de Reinhoud d'Haese, Vandercam, Wolvecamp, Eugène Brands ou Jean Raine, dont les œuvres, réalisées avec de la mie de pain, de la boue, du sable, des coquilles d'œufs ou du cirage, constituent autant d'apports à une « matériologie » étendant encore et toujours les conquêtes de l'art brut. Au reste, on retiendra que les ambitions artistiques de Cobra ont sans cesse été sous-tendues par une réflexion critique sur le devenir de la civilisation occidentale – dont Constant et Jorn, en particulier, redoutaient les excès rationalistes et les dérives techniciennes. L'un et l'autre en tireront des conséquences radicales en participant à la fondation de l'Internationale situationniste, anticipation notoire des mouvements de contestation qui émergeront durant les années 1960.
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Écrit par
- Catherine VASSEUR : docteur en histoire de l'art à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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Média
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