COLLAGE, physique
La durée de vie des collages
Les sarcophages des Égyptiens étaient collés avec du lait empoisonné. Conservés dans les pyramides, leurs collages durent encore. Les ingénieurs de l'aéronautique répètent que « ce n'est pas la résistance du collage qui les intéresse mais le niveau auquel elle peut descendre pendant la durée de vie de l'avion ». Un collage fort est très difficile à défaire et pourtant le décollement est le problème le plus redouté des constructeurs. La durée de vie des collages est caractérisée par l'existence de seuils au-delà desquels ils se dégradent. L'évaluation est d'autant plus délicate que les niveaux de contrainte, les variations de température et la composition de l'environnement auquel le joint sera exposé ne sont pas quantifiées.
Le rôle de l'eau
Les collages sont sensibles à la présence d'eau dans leur environnement. Quand elle ne déforme pas le substrat, l'eau à l'état liquide ou à l'état de vapeur modifie la colle durcie et agit à l'interface solide-adhésif. Elle diffuse lentement dans le volume et un peu plus vite à l'interface selon le degré d'ancrage. La quantité d'eau absorbée dépend du degré d'humidité. À faible concentration, l'eau ne modifie pas les propriétés du polymère. C'est ce qui fait que les produits collés sont stables dans les habitations où le degré d'humidité n'est pas trop élevé. Aux degrés d'humidité plus élevés, l'eau se lie aux groupes polaires que comportent les chaînes et plastifie l'adhésif. Le module élastique décroît ainsi que la température de transition vitreuse. À saturation, l'eau se condense dans les pores présents à l'interface. Pendant quelques jours, ces différentes étapes sont réversibles : lorsque l'humidité diminue l'eau ressort et le joint retrouve son état initial. Si la présence d'eau dure plus longtemps, des cloques apparaissent à l'interface. À des températures inférieures à 60 0C, l'hydrolyse des adhésifs de réaction est négligeable. Ce n'est pas l'eau elle-même qui provoque le décollement, mais son action sur la surface. Comme il s'agit d'un processus de diffusion lent, l'effet se manifeste d'abord sur les bords du collage et dépend de sa largeur. Il est fréquent d'observer une dégradation des bords alors que la partie centrale, restant sèche, n'est pas affectée. C'est ce qui fait que les essais de cisaillement normalisés ne montrent l'influence de l'eau qu'après des temps très longs.
Corrosion
La résistance à la rupture d'un joint aluminium/aluminium collé, immergé dans de l'eau distillée contenue dans une ampoule scellée, ne change pas après un séjour de sept années, alors qu'en présence d'eau courante ou exposé à l'air humide il perd sa résistance après deux années. En présence d'eau et d'oxygène, les métaux se dissolvent, l'eau devient conductrice, il se forme des zones anodiques et cathodiques et la réduction de l'oxygène produit des ions hydroxyles qui dégradent l'ancrage et conduisent à une fracture interfaciale. Dans la conception d'un joint collé, il faut veiller à ce que l'eau ne puisse demeurer sur le joint de colle.
Les mesures en atmosphère humide
L'évolution de la fracture de clivage est une indication de la qualité de l'ancrage. Si, en milieu sec, plusieurs collages ont la même longueur de fracture, ils auront une progression de la fracture différente selon la qualité du traitement de surface. Une fois le joint saturé d'eau, la fracture peut se stabiliser ou poursuivre sa progression jusqu'au décollement. La comparaison de la délamination de renforts de carlingue d'avion en service, dont certaines se décollaient, et d'essais de clivage réalisés sur ces[...]
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Écrit par
- Jacques COGNARD : docteur ès sciences, chef du groupe Matériaux, Asulab, Swatch Group R.-D.
Classification
Médias