COLLAGÈNE
La fibrillogenèse
Après sa sortie de la cellule, le tropocollagène va s'associer avec d'autres molécules de tropocollagène. Dans le cas des collagènes interstitiels, cette association se fait par décalage d'un quart de longueur de chaque molécule par rapport à l'autre et par la formation de protofibrilles élémentaires, probablement par l'association de cinq molécules de tropocollagène, comme indiqué sur les figures. À ce moment-là, une enzyme spécifique, la lysiloxydase, va oxyder quelques résidus de lysyle près des terminaisons (télopeptidiques) des molécules, permettant ainsi la formation des liaisons intercaténaires (ou liaisons pontiques) entre les molécules de tropocollagène voisines. Ces liaisons pontiques sont essentiellement de deux types distincts :
– le produit de l'oxydation de la lysine – l'allysine (δ-semi-aldéhyde de l'acide α-amino-adipique) – peut s'unir avec la fonction ε-amine d'une lysine sur la molécule de tropocollagène voisine pour former une base de Schiff :
– ou encore, deux résidus d'allysine sur deux molécules de tropocollagène voisines peuvent s'unir pour former un composé aldol (allysine aldol) :
D'autres types de liaisons intercaténaires sont aussi connues. Comme l'hydroxylysine et ses formes glycosylées peuvent également entrer dans ces liaisons pontiques (pour former par exemple l'hydroxy-lysinonorleucine), on connaît un grand nombre de ponts intercaténaires dont la fréquence varie d'un collagène à l'autre et se modifie aussi au cours du développement, au cours de la cicatrisation et au cours d'états pathologiques. Le pontage du collagène peut être inhibé par des agents chélatant le cuivre (cofacteur de la lysyle-oxydase) et en particulier par les lathyrogènes (β-amino propionitrile par exemple). Ces pontages stabilisent les molécules les unes par rapport aux autres et confèrent une très grande rigidité et résistance mécanique aux fibres de collagène. L'épaisseur des fibres est réglée par le nombre de protofibrilles élémentaires juxtaposées. La régulation de cette épaisseur fibrillaire joue un rôle important dans l'organogenèse et dans la morphogenèse. Ainsi, la transparence de la cornée est due à la très grande régularité du diamètre et de l'orientation des fibres de collagène synthétisées, avec une disposition en « patron » hexagonal, bien caractéristique. Dans les taies cornéennes, à la suite de blessures ou de brûlures cornéennes, cette synthèse s'effectue mal, l'épaisseur des fibres devient très variable ainsi que leur orientation, d'où la perte de la transparence de la cornée. Des modifications analogues de structure et de microarchitecture des fibres se retrouvent dans d'autres tissus aussi au cours de modifications pathologiques (fibroses, scléroses, cicatrisation pathologique).Les détails de biosynthèse sont légèrement différents pour les autres types de collagène ; ainsi, pour le collagène de type III, la formation de ponts disulfures entre les chaînes α s'effectue non seulement au niveau des terminaisons N- et C-terminales, mais aussi dans la partie triple hélicoïdale de la chaîne, et ainsi ces trois chaînes restent plus fortement associées après le découpage des deux terminaisons et ne peuvent être séparées après dénaturation par chauffage, seulement après réduction des ponts disulfures.
En ce qui concerne le collagène des lames basales (de type IV), il reste sous forme de procollagène après sa synthèse, les extensions N- et C-terminales ne sont pas coupées. C'est pourquoi ce type de collagène ne forme pas de fibrilles avec une périodicité caractéristique comme les collagènes interstitiels dont la périodicité de 640 nanomètres, très apparente sur les images de microscopie électronique, est due à ce décalage[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Ladislas ROBERT : directeur de recherche au C.N.R.S., docteur en médecine, docteur ès sciences, directeur de laboratoire de biochimie du tissu conjonctif à la faculté de médecine, université de Paris-Val-de-Marne.
Classification
Médias
Autres références
-
APONÉVROTIQUE TISSU
- Écrit par Didier LAVERGNE
- 272 mots
Tissu conjonctif fibreux constitué de plusieurs plans de fibres collagènes. Celles-ci sont parallèles entre elles dans un plan donné, mais d'un plan à un autre l'orientation des fibres est entrecroisée. Ainsi se constitue une trame jouant un rôle mécanique d'enveloppe souple et élastique. Cette...
-
ARTICULATIONS
- Écrit par Claude GILLOT et André-Paul PELTIER
- 6 073 mots
- 4 médias
...rupture biomécanique des éléments fibreux du cartilage dans ce type de pathologie. La partie solide de la matrice cartilagineuse est faite de fibres de collagène de type II et de protéoglycanes ou glycosamino-glycanes produits tous deux par les chondrocytes. Les fibres de collagène constituent près de... -
CANCER - Immunothérapie
- Écrit par Emmanuel DONNADIEU
- 5 131 mots
- 5 médias
...attirent appelées chimiokines, celles qui sont responsables des changements de forme de la cellule T, et d’éléments structuraux tels que les fibres de collagène de la matrice extracellulaire qui dictent les trajectoires cellulaires. On sait par exemple que, dans les ganglions lymphatiques, les lymphocytes... -
CIRCULATOIRES (SYSTÈMES) - Les systèmes circulatoires des animaux
- Écrit par Jean-Paul TRUCHOT
- 4 530 mots
- 7 médias
...aplaties ; une media comportant des fibres élastiques (élastine) et du tissu musculaire lisse ; une adventice externe conjonctive contenant des fibres de collagène. L'élastine des vertébrés (ou les substances elastin-like des invertébrés) est un matériau relativement plus extensible sous faible... - Afficher les 16 références