COLUMBIA
La Columbia est, avec Warner Bros, une des majors hollywoodiennes qui ont été dirigées le plus longtemps par leurs fondateurs. Harry Cohn (1891-1958) et son frère Jack, associés au juriste Joe Brandt – tous trois transfuges du studio Universal – ont fondé à Hollywood une société, nommée CBC d'après leurs initiales, et dont les ambitions sont si modestes qu'on l'a surnommée, d'après ce sigle, « Corned Beef and Cabbage ». Le trio la rebaptise Columbia en 1924, et achète un petit studio au cœur de Hollywood. La jeune société, qui n'est qu'une petite entreprise parmi d'autres sur le marché des compléments de programme et des circuits populaires, va devenir aux environs de 1930 une des huit majors qui dominent le cinéma américain et mondial.
Lorsque Joe Brandt vend ses parts à Harry Cohn celui-ci devient à la fois président de Columbia et chef de la production – cas unique dans l'univers des majors – alors que son frère Jack dirige la distribution depuis les bureaux de New York. Homme fruste, connu pour ses mauvaises manières vis-à-vis des acteurs (et des actrices), ainsi que des réalisateurs, incarnation parfois caricaturale du moghul hollywoodien, « ce tyran qui savait faire des films » est doté d'un très sûr instinct commercial et d'une grande habileté dans le montage des budgets. C'est sur lui que repose l'ascension de la Columbia, qui avait commencé par produire des films à petit budget, des séries B (westerns et petites comédies) et des serials (Blondie, The Shadow, Jungle Jim, Terry et les pirates). Une minorité de films A, grâce à Frank Capra, lui permet d'obtenir quelques oscars dans les années 1930 (New York-Miami, L'Extravagant Mr Deeds, Vous ne l'emporterez pas avec vous). Ne disposant pas d'un grand nombre d'acteurs de premier plan sous contrat (le studio a toutefois découvert Jean Arthur, Cary Grant, Rita Hayworth), Harry Cohn sait emprunter aux grands studios les stars en disgrâce ou momentanément sans affectation. C'est le cas du duo Clark Gable-Claudette Colbert, « prêtés » par MGM et Paramount pour New York-Miami (1934), une des meilleures recettes de la Columbia.
La stratégie évolue à partir de 1940. Harry Cohn s'engage catégoriquement dans les films A, en préservant la tradition des séries et des feuilletons (les Trois Stooges auront duré de 1934 à 1959) et des westerns (avec Budd Boetticher en particulier). Grâce à de nouveaux réalisateurs à qui il sait faire confiance, et à des acteurs comme Rita Hayworth, Glenn Ford, William Holden, Jack Lemmon, ou encore Frank Sinatra dont il relance la carrière, la production et la diffusion s'honorent de films prestigieux qui sont souvent des succès : La Dame de Shanghai, Gilda, Tant qu'il y aura des hommes, Ouragan sur le Caine,Picnic, Le Pont de la rivière Kwaï, Lawrence d'Arabie (ces deux derniers en coproduction avec le Royaume-Uni).
Ancien distributeur des dessins animés de Disney aux débuts du parlant, Columbia développe cette activité, créant son propre studio en 1940, embauchant notamment Frank Tashlin, puis s'engageant aux côtés de la jeune UPA de Stephen Bosustow (Mr Magoo, Gerald McBoingBoing). Cette attention permanente aux compléments de programme et aux séries amène logiquement les frères Cohn à s'intéresser aux débouchés offerts par la télévision : bien avant les autres majors, dès 1951, ils créent leur filiale télévisuelle spécialisée, Screen Gems.
Jack et Harry Cohn décédés respectivement en 1956 et 1958, le studio continue sur sa lancée, mais les difficultés financières affectent son fonctionnement dans les années 1970. Le nom du studio est attaché à des films comme La Dernière Séance, Nos Plus Belles Années, Taxi Driver, ainsi qu'à des films d'indépendants comme Robert Altman, ou Denis Hopper (Easy[...]
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Écrit par
- Daniel SAUVAGET : économiste, critique de cinéma
Classification
Autres références
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CAPRA FRANK (1897-1991)
- Écrit par Joël MAGNY
- 1 798 mots
- 2 médias
...que le réalisateur le cantonne dans un rôle trop simplet. Après plusieurs tentatives infructueuses, Capra se voit offrir un contrat de réalisateur par la Columbia, un studio sans moyens, ni vedettes, dirigée par un despote prétentieux, Harry Cohn, à qui l'on prête une phrase restée célèbre : « Si vous avez...