COMÉDIE ITALIENNE, cinéma
L'importance des interprètes et le rôle des scénaristes
On se doute que la comédie italienne est avant tout rendue vivante par ses interprètes. Leurs types ont été décrits par Dino Risi et d'autres réalisateurs. Mais par-delà leurs différences d'origine, les « cinq grands » (Vittorio Gassman, Nino Manfredi, Marcello Mastroianni, Alberto Sordi et Ugo Tognazzi) incarnent chacun un aspect, voire plusieurs, de l'Italien. Rien de moins abstrait que cette généralisation, les Italiens de leur propre aveu ne cessant de s'interroger sur la particularité d'être italien, c'est-à-dire sur la paradoxale unité que leur confèrent leur provincialisme, leur absence de chauvinisme, le manque d'une tradition culturelle centralisée, l'irrigation opérée par des traditions culturelles latentes et, par-dessus tout, leur individualisme. (On notera que les « cinq grands » ont tous connu des succès dans des rôles dramatiques, voire tragiques, insérés ou non dans des films à prédominance « comique ».) Quant aux actrices, si seule Monica Vitti doit à la comédie une seconde carrière aussi éblouissante qu'inattendue (Moi, la femme, 1971, de Dino Risi), elles ont tenu (Sophia Loren en tête) une place importante dans la « formation » du genre avant de devenir des « stars ». Telles qui servent aujourd'hui de faire-valoir, comme naguère Claudia Cardinale, ont l'espoir d'être des étoiles demain.
Les débuts du genre marquent déjà des entrelacs d'influences. Pour quelques traits de satire appuyée dans la saynète charmante de Pain, amour et fantaisie (1953), Comencini dut certifier que l'honneur du corps des carabiniers n'était pas mis en cause. Vers la même époque, le numéro d'acteur commence à déborder la facilité de la pochade (Sordi dans Venise, la lune et toi, 1958, de Dino Risi). Un survivant du cinéma ancien, qui s'était déjà signalé dans la comédie, lance à la fois Sophia Loren et Mastroianni, sous l'œil attendri de De Sica, et s'offre le luxe d'égaler la rigueur de Lubitsch à partir d'un thème tout italien (Alessandro Blasetti, avec Dommage que tu sois une canaille, 1955).
En même temps, des scénaristes venus du théâtre populaire et des compagnies de music-hall (Fellini à ses débuts aura travaillé pour eux) « concoctent » des films à faible budget et à la réalisation souvent médiocre, mais où passe un certain vent de folie, où éclate une certaine stridence, dont la comédie proprement dite bénéficiera plus tard. Bandes souvent vulgaires, où s'étalent avec franchise les obsessions, les peurs et les désirs des Italiens « moyens ». Tous ces scénaristes n'ont pas la chance d'avoir pour interprète et collaborateur Totò, ni même le grand monologueur-bafouilleur Walter Chiari.
Ils travaillent souvent à deux, en équipe (tels Metz et Marchesi pour Totò, l'un signant parfois aussi la rudimentaire mise en scène). Dès la fin des années quarante, l'équipe Steno- Monicelli, débordée de travail, appelle à la rescousse des rédacteurs de journaux humoristiques, parmi lesquels Age et Scarpelli, qui formeront bientôt eux aussi un célèbre tandem. Passés à la réalisation, d'abord ensemble puis individuellement, Steno et Monicelli poursuivront une nouvelle carrière, qui, pour le second, s'écartera plus d'une fois de la comédie.
Ce qu'apportent les scénaristes à la comédie italienne au cours des années soixante, c'est une invention, que la pratique du tandem relance dans les conversations privées, pendant et après le travail (au point que Monicelli a parlé de « ping-pong intellectuel »). Mais cette invention repose sur une observation ininterrompue de la réalité, sur la notation de mille petits faits vrais et savoureux qui reparaîtront, à point nommé, dans des intrigues des plus cocasses[...]
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Écrit par
- Jean A. GILI : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne
- Gérard LEGRAND : écrivain, philosophe, critique d'art et de cinéma
Classification
Médias
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