COMÉDIE ITALIENNE, cinéma
Recettes et problèmes de la mise en scène
La comédie italienne a suivi l'évolution générale du cinéma européen. Ce qui veut dire que les questions proprement techniques de mise en scène, de rythme, d'efficience, sinon de beauté plastique, y ont pris le pas sur la simple transcription de scénarios. Les meilleures idées de scénaristes ne sont presque rien si la mise en images est déficiente : on en eut la preuve lorsque le vieux routier Pietro Germi, qui avait intégré des éléments de la « nouvelle comédie » à ses satires sociales robustes mais conventionnelles (Divorce à l'italienne, 1961, au titre significatif, et surtout Séduite et abandonnée, 1964), écrivit et produisit Mes chers amis (1975). Il mourut peu avant le tournage et Mario Monicelli filma le projet sans presque rien y changer : des situations excellentes, mais un dialogue pléthorique, l'absence d'invention visuelle et la lenteur d'épisodes parasitaires montrent les limites de Germi dans un « genre » qu'il n'avait pas complètement assimilé. L'ex-scénariste Ettore Scola a tenté d'orienter la comédie (Affreux, sales et méchants) vers une dénonciation presque complaisante de la laideur et de la misère gluante. Aussi son meilleur film, Une journée particulière, n'a-t-il rien à voir avec la comédie, à laquelle il a donné, depuis lors, l'excellent Maccheroni (1985) et le lucide Roman d'un jeune homme pauvre (1995).
Le cas d' Alberto Lattuada est différent. Venu du cinéma « sérieux », metteur en scène prestigieux au style calligraphique dans les années cinquante, il s'est « reconverti » dans la comédie en y apportant ses obsessions personnelles, l'érotisme, notamment (Venez donc prendre le café chez nous, 1970), même si son écriture s'est un peu empâtée. Mais les cinéastes les plus doués pour la « comédie italienne » au sens strict restent Monicelli, auteur de ce film repère que fut Le Pigeon (I Soliti Ignoti, 1958), Comencini et Risi.
Alors que Monicelli, ancien metteur en scène de quelques-uns des meilleurs Totò, et inventeur avec L'Armata Brancaleone (1966) de la comédie « transposée » (dans le Moyen Âge des héros de l'Arioste), est d'origine toscane, Risi et Comencini appartiennent à l'Italie du Nord, volontiers laïque, frondeuse à l'égard du clergé. C'est surtout en 1960-1961, avec La Grande Pagaille (Tutti a casa) et À cheval sur le tigre, fondés d'ailleurs sur des sujets sérieux, que Comencini a donné sa mesure d'auteur comique. On citera également Mon Dieu, comment suis-je tombée si bas ? (1974, satire du « néo-romantisme » avant la lettre), L'Argent de la vieille (Lo Scopone scientifico, 1972) et Le Grand Embouteillage (1979). Mais l'auteur de Casanova, de L'Incompris et de Pinocchio sait ménager des effets comiques jusque dans le drame. Quant à Risi, le succès international des Monstres (1963) a marqué le début d'une époque. Parfaitement à son aise dans la catégorie plus ancienne du « film à sketches » (Les Poupées, 1961 ; et surtout Vedo nudo, 1969, dont il est seul signataire), il a obliqué lui aussi vers le registre dramatique avant sa quasi-retraite (Cher papa).
La comédie italienne, capable d'embrasser toute l'histoire de l'Italie depuis vingt-cinq ans à travers celle de son cinéma – comme dans Une vie difficile de Dino Risi (1961) ou Nous nous sommes tant aimés d'Ettore Scola (1974) –, a subi de plein fouet la concurrence de la télévision. Ses créateurs et animateurs se sont retrouvés au complet ou presque pour Les Nouveaux Monstres (1977), film « commémoratif » qui a été un triomphe en Italie et a eu quatre cent mille spectateurs à Paris lors de sa sortie. Mais ce fut un feu de paille. Les tentatives ultimes, cyniques ou prétentieuses, pour renouveler le genre par[...]
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Écrit par
- Jean A. GILI : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne
- Gérard LEGRAND : écrivain, philosophe, critique d'art et de cinéma
Classification
Médias
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