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COMIQUE

Le comique transcende les genres, et notamment la comédie. Il désigne plus généralement la qualité d'un personnage, d'une situation ou d'un texte, qui suscite le rire chez le lecteur ou le spectateur. Mais plutôt que du comique, on devrait parler de « comiques ». On en distingue généralement trois sortes. Le « comique de caractère » stigmatise le ridicule d'un personnage. Parfois réduit à un vice, ce dernier prête à rire par ses contradictions et ses excès. Ainsi en va-t-il d'Harpagon dans L'Avare (1668) ou de Monsieur Jourdain dans Le Bourgeois gentilhomme (1670) de Molière. Le « comique de situation » désigne des jeux de scène, tels que les lazzi dans la commedia dell'arte, la présence de personnages cachés ou les quiproquos. Enfin, le « comique de langage » joue sur l'exagération, la déformation ou les jeux de mots. On le voit, le rire naît le plus souvent d'une distorsion par rapport à l'habitude, d'un écart entre la norme et un comportement particulier. En définissant le comique comme « du mécanique plaqué sur du vivant » (Le Rire. Essai sur la signification du comique, 1964), Henri Bergson privilégie l'inadaptation à une situation donnée. Un homme qui trébuche peut être comique dès lors qu'il n'a pas vu un obstacle qu'il aurait dû contourner. Or cet écart est ramené par Bergson à un mécanisme de groupe et, plus exactement, à une réponse de la majorité à un comportement jugé inapproprié. Ainsi le comique frappe-t-il ce qui s'éloigne de la norme sociale. La description de la casquette de Charles Bovary, dans Madame Bovary (1857) de Gustave Flaubert, témoigne de la différence entre le « nouveau » et ses camarades de classe, englobés dans le « nous » du récit.

Telle est sans doute la fonction morale que s'assigne la comédie, qui prétend « châtier les mœurs en riant ». La comédie se veut en effet une stigmatisation des vices et des ridicules des hommes. Elle naît en Grèce avec Aristophane (env. 445-380 av. J.-C.), puis gagne les terres latines avec Plaute (env. 254-184 av. J.-C.) et Térence (env. 190-159 av. J.-C.). Selon un schéma traditionnel, elle dépeint les difficultés de deux jeunes amoureux, dont les parents refusent l'union, et s'achève sur une fin heureuse. Toutefois, la seconde partie de la Poétique (vers 340 av. J.-C.) d'Aristote, qui était précisément consacrée à la comédie étant perdue, la théorisation du genre reste lacunaire. Les poéticiens du xviie siècle la laisseront également à l'écart, ce qui lui permettra en revanche de prendre une plus grande liberté vis-à-vis des règles classiques. Il faut toutefois noter que tragédie et comédie semblent se déterminer l'une par rapport à l'autre : à l'inverse du drame shakespearien, qui n'hésite pas à mêler les tonalités tragiques et comiques, le théâtre français conserve une nette séparation.

À la comédie revient ainsi la fonction de peindre les hommes pires qu'ils ne sont et, faisant rire de leurs vices, d'en détourner le spectateur. Cependant, de même que tout comique ne relève pas de la comédie, toute comédie n'est pas comique. S'il arrive que l'on sourie aux discours des exploits mensongers de Matamore dans L'Illusion comique(1635), la comédie élevée de Pierre Corneille ne cherche guère à susciter le rire. Et il faudra attendre Paul Scarron, puis Molière, pour que le public français du xviie siècle s'amuse au spectacle des vices humains. C'est que, semble-t-il, le rire abaisse. On s'en méfie. Si la terreur et la pitié que recherche l'effet tragique sont à l'honneur, le comique semble n'être qu'un divertissement populaire. C'est peut-être pour cette raison que les dramaturges tentent de justifier la comédie par sa vertu morale. Ainsi Molière défend-il son [...]

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure, agrégée de lettres modernes, docteure en lettres modernes et en arts du spectacle

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