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COMMENTAIRES, genre littéraire

Le mot latin commentarii désignait des recueils de notes ou de documents de types divers (Mémoires d'un homme public ou d'un particulier, journal officiel, registres, pièces judiciaires, procès verbaux, annotations explicatives...) ; on le retrouve dans les titres de quelques-uns des ouvrages où les savants philologues du xvie siècle ont accumulé leurs observations sur les langues anciennes (Commentarii linguae graecae de Budé, Commentarii linguae latinae de Dolet). Le mot français « commentaires », dans son emploi littéraire, a retenu deux des sens du mot latin : celui d'abord de « mémoires » (César avait écrit les Commentarii ; F. de Rabutin, au xvie siècle, rédige les Commentaires des guerres entre Henri II et Charles Quint, et B. de Monluc raconte ses campagnes dans ses Commentaires) ; celui ensuite — beaucoup plus fréquent et toujours actuel — de notes ou éclaircissements destinés à faciliter l'intelligence d'un texte ancien ou obscur, et qui peuvent être l'œuvre de philologues et/ou d'exégètes. La Bible a ainsi été l'objet de multiples commentaires : ceux d'Origène, de saint Jérôme, ceux de Molina sur les Épîtres de saint Paul, ceux de Calvin sur le Nouveau Testament, etc. De même les classiques latins et grecs — et cela dès l'Antiquité : ainsi Homère (la critique alexandrine, en particulier Aristarque) ou Virgile (Servius Honoratus). On sait le rôle qu'ont joué ensuite, dans la diffusion et l'interprétation des philosophies aristotélicienne et platonicienne, les commentaires d'Averroès (xiie s.) et de saint Thomas (xiiie s.) d'une part, de Marsile Ficin (xve s.) d'autre part. Au xvie siècle, les humanistes (Budé, Casaubon, Lambin, Scaliger) ne se contentent pas d'établir et de publier des textes plus sûrs, ils accompagnent leurs éditions de copieux commentaires latins. Au cours des siècles suivants, on continuera à élucider les difficultés des textes, à fournir les éclaircissements littéraires ou historiques indispensables, à signaler les passages à admirer, à suggérer de nouvelles interprétations, et aussi, trop souvent, à faire étalage de vaine érudition — d'où, dans les éditions modernes, un effort d'allégement. Des travaux du même type seront entrepris sur les œuvres modernes. Certains d'entre eux sont plus nettement normatifs. Plusieurs dates importantes de l'histoire de la littérature française sont marquées par des commentaires (les notes de Malherbe en marge d'un exemplaire des œuvres de Desportes, le Commentaire sur Corneille de Voltaire) ; et l'on comprend l'intérêt des commentaires pour une histoire des interprétations — qui peut être aussi une histoire des mentalités.

— Bernard CROQUETTE

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII

Classification

Autres références

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