- 1. Matières premières du Sud contre production industrielle du Nord
- 2. Une nouvelle D.I.T.
- 3. De nouveaux acteurs
- 4. Échanges croisés de produits différenciés
- 5. Une nouvelle donne concurrentielle
- 6. Vers une organisation globale des firmes
- 7. Fractionnement des chaînes de valeur ajoutée
- 8. Bibliographie
COMMERCE INTERNATIONAL Division internationale du travail
À l'image de la célèbre manufacture d'épingles dépeinte par Adam Smith (La Richesse des nations, 1776), dans laquelle chaque ouvrier se voyait affecté à une tâche précise participant à la production de l'atelier, la notion de division internationale du travail (D.I.T.) fait référence à la spécialisation des économies nationales dans des activités particulières, laquelle donne lieu à des échanges commerciaux. La participation à la D.I.T. implique, en effet, dans un pays, l'abandon (total ou partiel) des activités les moins efficaces économiquement, qui sont concurrencées par les importations, et l'affectation des ressources ainsi libérées (hommes, capitaux, ressources naturelles) aux activités les plus efficaces, dont le produit sera exporté. La variété des « Made in » indiqués sur les produits que nous consommons quotidiennement offre un raccourci saisissant de la très forte interdépendance des économies. Il est d'usage de parler de « nouvelle division internationale du travail », à propos des modalités actuelles de partage international des tâches, un phénomène qui a connu une accélération récente.
L'échange international porte également sur les services : ces échanges sont toutefois beaucoup moins libéralisés que ceux qui portent sur les biens et s'appuient pour l'essentiel sur la présence à l'étranger (une banque installe une filiale à l'étranger et distribue sur place des services financiers), ou a contrario sur le déplacement du consommateur (un cafetier parisien servant une eau gazeuse à un touriste étranger exporte un service). Il s'agit donc d'une logique très différente de la D.I.T. telle qu'elle est envisagée dans cet article.
Matières premières du Sud contre production industrielle du Nord
L'échange international apparaît dès les toutes premières civilisations, comme en témoigne la mise au jour de poteries ou de monnaies anciennes bien loin de leur lieu de production. C'est que l'échange, dont les économistes montrent le caractère mutuellement avantageux, est aussi ancien que l'industrie humaine. L'échange est la rencontre de deux raretés relatives : ce qui est plus rare dans un pays l'est moins dans un autre, et chaque pays est prêt à abandonner une certaine quantité de ce dont il dispose en abondance relative pour se procurer ce dont l'autre pays dispose abondamment. Les bases de la D.I.T. ne sont pas différentes aujourd'hui : les différences relatives de dotations en ressources et les écarts de productivité et de technologie entre les pays permettent effectivement de rendre compte du contenu du panier de biens importés et exportés par ces pays. Ce qui est nouveau, en revanche, a trait à l'étendue de cette D.I.T., aux formes qu'elle prend, et à la profonde interdépendance de nos économies.
La spécialisation des productions suppose des contacts réguliers, des moyens de transport efficaces, l'existence de marchés structurés, une ouverture des frontières (par la négociation ou le canon, selon les circonstances). À l'échelle historique, toutes ces conditions n'ont été vraiment réunies que très récemment. Les grandes plaines de la Russie déversent au xixe siècle leurs grains sur une Europe de l'Ouest qui développe alors des productions industrielles. L'Angleterre bloque le développement du textile-habillement dans sa grande colonie des Indes et exporte les « indiennes », tissées chez elle. L'Allemagne exporte des locomotives... Le « long xixe siècle », que les historiens économiques comme Eric Hobsbawm prolongent jusqu'à la Première Guerre mondiale, est caractérisé par un premier mouvement de mondialisation. Chemins de fer, bateaux à vapeur détrônant les clippers, câbles sous-marins transatlantiques pour le télégraphe, développement de[...]
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Écrit par
- Lionel FONTAGNÉ : professeur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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