COMMUNE DE PARIS
Les communards
Ces hommes qui composent la Commune sont d'origines diverses. On y trouve des bourgeois riches : ils s'élimineront d'eux-mêmes, en donnant leur démission, et seront remplacés lors des élections complémentaires du 16 avril ; puis les élus issus de la petite et moyenne bourgeoisie : employés, instituteurs, médecins, journalistes, qui avaient déjà milité sous le second Empire dans les rangs du Parti républicain, et qui constituent la majorité de la Commune ; enfin, on dénombre vingt-cinq ouvriers – chiffre inhabituel pour l'époque dans une assemblée élue –, affiliés souvent à l'Internationale, venant du Comité central, et qui se retrouvent généralement unis dans la minorité. Plusieurs tendances en effet s'expriment : la majorité groupe des blanquistes se réclamant du vieux prisonnier, qu'on cherchera par la suite à échanger contre l'archevêque de Paris, Mgr Darboy ; des jacobins, qui ont fait la révolution de 1848, et ont gardé le souvenir de la Révolution de 1789 (Delescluze incarne ce type de républicain) ; des radicaux comme Vallès et Vermorel, qui, partisans d'une république démocratique et sociale, ne décèlent pas nettement les transformations économiques nécessaires qu'elle implique. Du côté de la minorité, les ouvriers ne forment pas un bloc idéologique plus uni. Artisans, d'ailleurs, plus qu'ouvriers de la grande industrie, ils appartiennent le plus souvent au courant proudhonien de l'Internationale (Frankel, lui, est en relation personnelle avec Karl Marx). Mais par leur origine, leur passé de militants dans l'Internationale et les chambres syndicales, les élus formant la minorité de la Commune s'intéressent davantage aux questions sociales qu'aux problèmes politiques. C'est pourquoi on a pu les appeler des « socialistes révolutionnaires ». Mais nulle trace de partis, d'organisations structurées dans tout cela : s'il arrive à des membres de la minorité de voter avec la majorité, l'inverse se produit plus souvent encore. Parmi ces hommes, il y a des personnalités de premier plan : le peintre Courbet, l'écrivain Jules Vallès, le savant Gustave Flourens ; d'admirables figures d'ouvriers, comme Varlin ou Benoît Malon ; de vieux républicains, comme Delescluze qui mourut en héros sur les barricades ; mais aussi des rhéteurs vaniteux et sans scrupules, comme Félix Pyat, qu'on a pu appeler « le mauvais génie de la Commune », des imbéciles comme Allix ou Babick. Tous se trouvèrent brusquement confrontés avec des événements difficiles à vivre et à surmonter, et pour lesquels ils n'étaient nullement préparés.
Ce ne sont pas seulement ces hommes qui sont au pouvoir, mais le peuple de Paris tout entier à travers les sections de l'Internationale, les chambres syndicales, les coopératives, les comités d'arrondissement coiffés du Comité central républicain, et les clubs. Ces derniers, qui existaient déjà pendant le siège, se sont multipliés et l'on y discute des problèmes immédiats d'organisation et de défense, mais aussi de questions plus générales : la femme dans la société, les relations du capital et du travail, etc. D'autre part, les femmes ne restent pas inactives : groupées dans l'Union des femmes pour la défense de Paris et les secours aux blessés, fondée par une amie de Marx, Elizabeth Dmitrieff, on les voit aussi dans les comités de vigilance, dans les clubs, et, comme cantinières, ambulancières ou soldats, jusque sur les remparts. Enfin, le Comité central de la garde nationale, qui malgré ses déclarations n'a nullement abdiqué, continue à tenir ses séances et à prétendre diriger la lutte. Il crée ainsi, à côté de la Commune, un second pouvoir, facteur d'anarchie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Édith THOMAS : conservateur aux Archives nationales
Classification
Médias
Autres références
-
CLÉMENT JEAN-BAPTISTE (1837-1903)
- Écrit par Pierre Thomas CAMELOT
- 311 mots
Né de parents aisés, avec lesquels il a rompu très jeune, Jean-Baptiste Clément tire de son expérience champêtre et de ses lectures (surtout de Banville et Murger) la source d'inspiration de ses premières chansons. Avec ses Bergerettes et Villageoises, mises en musique par Joseph Darcier...
-
CLUSERET GUSTAVE PAUL (1823-1920)
- Écrit par Jean BANCAL
- 397 mots
Fils de militaire, Gustave Cluseret entre à Saint-Cyr et participe comme lieutenant à la répression des journées de juin 1848. À la suite de divers trafics en Algérie, il est obligé de démissionner de l'armée en 1858. Cet aventurier devient condottiere et révolutionnaire professionnel. Il se...
-
COURBET GUSTAVE (1819-1877)
- Écrit par Pierre GEORGEL
- 3 483 mots
- 6 médias
...La Pauvresse du village (1867, coll. part.) et L'Aumône d'un mendiant, ultime résurgence de la veine inaugurée par Les Casseurs de pierre. À Paris, en 1870 et 1871, il est en première ligne pendant le Siège et la Commune, bien qu'il rêve de paix et réprouve la violence, et il exécute de... -
DELESCLUZE LOUIS CHARLES (1809-1871)
- Écrit par Jean BANCAL
- 483 mots
Cet homme, qui sera la plus grande autorité morale de la majorité communarde, est d'extraction bourgeoise. Ses luttes incessantes pour la République, son courage, sa volonté farouche, malgré ses multiples emprisonnements et ses épreuves, lui vaudront le surnom de Barre de fer. Étudiant en droit,...
- Afficher les 29 références