COMMUNICATION
La démarche ethnographique
La démarche ethnographique est avant tout un « art de voir ». Ce n'est pas seulement que l'ethnographe « regarde autour de lui » ; il fait de son regard un outil de travail, à la fois en laissant venir à lui ces différences que lui envoie le terrain (différences objectives), en exploitant ses souvenirs et ses connaissances d'un état antérieur du terrain (différences subjectives), en interrogeant le terrain à partir de la littérature anthropologique (différences construites).
Mais ce « savoir voir » se double d'un « savoir écrire » : il faut convertir aussi rapidement que possible les traces visuelles en traces écrites. Il ne suffit pas d'enregistrer ; il faut encore convoquer nos capacités intellectuelles de transcodage. Contrairement à l'enregistrement, l'écriture est un processus de transsubstantiation. Les notes, même griffonnées dans un premier temps sur un bout de papier, sont l'aboutissement d'un processus complexe de sélection dans un flot permanent de données potentielles, de cristallisation mémorielle, de premier traitement analytique – les notes ne sont jamais brutes. Ce qui n'empêche pas le chercheur de les remettre en ordre le soir même si possible, développant ainsi un diary (journal de bord), comme on dit souvent dans la profession. C'est ce vivier d'observations qui s'avérera souvent, avec les entretiens, la source principale d'inspiration au moment du second passage à l'écriture, celui qui mène au texte plein, qui sera diffusé d'une manière ou d'une autre parmi les pairs et au sein d'un public plus ou moins vaste. Comme l'a rappelé énergiquement l'anthropologue américain Clifford Geertz à plusieurs reprises, l'anthropologue est avant tout un auteur : pas de texte, pas de science.
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Écrit par
- Yves WINKIN : professeur des Universités, École normale supérieure de lettres et sciences humaines, Lyon
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